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Au revoir là-haut
Sortie
le 07/06/2024
chez
Gaumont vidéo (DVD et Blu-Ray)
De Albert Dupontel avec Nahuel Perez-Biscayart, Albert Dupontel, Laurent Lafitte, Niels Arestrup, Emilie Dequenne, Mélanie Thierry, Héloïse Balster et Philippe Uchan (les 07, 11 et 12/06)
Novembre 1919. Deux rescapés des tranchées, l'un dessinateur de génie, l'autre modeste comptable, décident de monter une arnaque aux monuments aux morts. Dans la France des années folles, l'entreprise va se révéler aussi dangereuse que spectaculaire...
Divinement bien filmé et cela dans tous les sens du terme, on sent que le réalisateur et acteur Albert Dupontel s’est vraiment fait plaisir en passant un nouveau cap dans la mise en scène d’un de ses longs métrages (de la comédie délirante au drame fort et poignant comme c’est le cas ici !), de surcroît d’époque et donc en costumes...et aussi en masques (la libre adaptation du livre éponyme de Pierre Lemaître, Prix Goncourt en 2013), avec une reconstitution aussi superbe que minutieuse d’une période bel et bien révolue (dans des décors depuis la fin de la guerre de 14-18 jusqu’au tout début des années 20), des techniques et des plans d’une audace folle (emploi de drone volant et d’une steadicam plongeante, ainsi que des explosions, des effets spéciaux, des fonds verts...), des acteurs prestigieux et totalement au diapason (un film que l’on peut tout à fait qualifier de choral), et une histoire saisissante et prenante, aussi crédible ou, du moins, aussi réaliste que possible. Fort est de constater que grâce à tous ces éléments réunis, on ne peut qu’être pris par les aventures particulièrement rocambolesques de 2 « poilus survivants » - Albert Dupontel en aide-comptable maladroit à la Buster Keaton et un peu plouc sur les bords, faisant l’étonné à tout bout de champ (...de bataille !), et Nahuel Perez-Biscayart (vu dans Grand central, Je suis à toi, et 120 battements par minute) en « gueule cassée » revêtant une multitude de masques plus incroyables les uns que les autres -, bref, 2 rescapés de la Grande Guerre qui vont sans foi ni loi s’improviser escrocs envers la Patrie, « vendant des (faux) monuments aux morts mais sans les fabriquer et en se barrant avec la caisse », tout en devant échapper autant à un père sévère mais juste (interprété par le formidable Niels Arestrup à l’œil toujours perçant et aux mots cinglants) qu’aux noirs dessins d’un jeune capitaine avide et retors (sous les traits de Laurent Lafitte dans un rôle qui lui va si bien), à la fois criminel démoniaque et sans scrupule et ordure finie, cupide et prête à tout (« on parle d’affaires, pas de vertu ! »). Comment ne pas tomber sous le charme de cette fresque pamphlétaire « monumentale » servie avec merveille, goût, sensibilité et délicatesse, tour à tour artistique, esthétique, poétique, historique, féérique, psychologique, humoristique, cynique, dramatique et même tragique limite horrifique, quasiment dans le même esprit qu’Un long dimanche de fiançailles porté à l’écran par Jean-Pierre Jeunet (on pense à lui ici à travers certaines séquences - dont celle du flash-back – pas loin d’Amélie Poulain !) et tirée également d’un roman à succès (celui de Sébastien Japrisot se déroulant pendant la 1ère guerre mondiale) ? Entre trafics, combines, magouilles, falsifications, entourloupes, billevesées, tentatives de corruption, intimidations et petite enquête, on est pris par les pérégrinations à tout ce beau monde en se demandant bien quand le pot-aux-roses sera découvert et comment tout cela va finir ! Plus visuel que dialogué, plus nostalgique qu’enlevé, plus roublard que méchant et cruel, cette production inspirée, aussi judicieuse qu’audacieuse et ambitieuse, mérite qu’on s’y attarde, d’autant qu’il y a un rythme intrigant assez soutenu (sur presque 2h), une folie ambiante (foisonnement de masques et fête dans le style de Gatsby le magnifique !), sans oublier une BO tournoyante et valsante composée par Christophe Julien, qui nous renvoie en ces temps jadis que nous ne connaîtrons jamais sauf grâce à la magie du cinéma bien sûr... En bonus, un foisonnement de petits documentaires certes assez courts mais pourtant très détaillés : Pierre Lemaître sur le plateau (très impressionné par le tournage, notamment par les masques pertinents), Préparation de Nahuel Perez-Biscayart (où on le voit apprendre à danser, à dessiner et à porter des masques), Laurent Lafitte – les risques du métier (enseveli dans les conditions du réel pour une scène), Masques, décors, costumes (avec les essais des masques par sa créatrice Cécile Kretschmar entre tristesse, ironie, délire et abstraction ; la créatrice des costumes entre autres sur les soldats et nos 2 héros ; l’installation de certains décors comme ceux de la banque et d’un salon bourgeois), La guerre – la charge (autour de la préparation du champ de bataille), La guerre – Albert Maillard (sa sortie d’un trou), La guerre – Pradelle (dans les tranchées), Histoire d’un plan – hôpital (les différents cadrages dans une chambre) et celui de l’arrivée à Paris (en 3 étapes raccordées de la rue jusqu’en studio), Pierre Lemaître – scène très coupée (où il officie comme dactylographe), Jour de pluie (tournage mouillée dans les tranchées), Du son en extérieur (les aléas du tournage avec des passages d’avions en pleine scène), Effets spéciaux (fond vert, en numérique et en incruste, avec certaines bases de données à aller chercher), Parade des masques (à travers 4 scènes coupées), Plan d’ouverture (avec le chien avançant dans les tranchées), Jeux de lumière (l’ascenseur du Bon Marché reproduit en studio), Scène la plus difficile du film (celle où Albert Dupontel est enseveli dans un trou avec un cheval mort), Album photo du film (une quarantaine de photos noir & blanc prises sur le tournage), plus une bande annonce et un teaser....
C.LB
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