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Ercole amante (jusqu’au 12 novembre)
le 04/11/2019
au
Opéra Comique, 1 place Boieldieu 75002 Paris (lundi 4, mercredi 6, vendredi 8, dimanche 10 à 15h, lundi 12 novembre à 20h - durée: 3h30, entracte compris)
Mise en scène de Valérie Lesort et Christian Hecq avec Nahuel di Pierro, Anna Bonitatibus, Giuseppina Bridelli, Francesca Aspromonte, Krystian Adam, Eugénie Lefevbre, Giulia Semenzato... écrit par Francesco Cavalli
Un soleil entouré d’étoiles qui chantent, des colonnes doriques qui marchent, un palmier qui surgit et se met à pousser, une Vénus en montgolfière, un Neptune en sous-marin, des nageurs en brassière qui s’élancent dans les flots, des danseurs en costumes grecs, le sommeil incarné, des fleurs qui surgissent et se muent en chanteuses, un monstre dentu, mais sympa finalement, on peine à résumer ici l’intrigue de « Ercole amante » (Hercule Amoureux), long opéra baroque présenté actuellement à l’Opéra Comique. Disons simplement qu’Hercule est amoureux d’Iole dont il a pourtant tué le père. Dejanire, jalouse de l’infidélité de son époux Hercule, lui offre une tunique qui va le consumer dans de telles souffrances qu’il préférera la mort. Dejanire, au désespoir, le suivra dans la mort. Mais Hercule, qui a fait le tour de l’état de mortel sera ressuscité par Jupiter et pourra s’asseoir au rang des dieux. Et l’on vous fait grâce de toutes les péripéties intermédiaire.... Derrière le foisonnement de l’intrigue, la surabondance de décors, de costumes, de danses et d’airs, derrière les apparitions et autres machineries, il y a ce que l’on appelait un Opéra de Cour. Ercole Amante date de 1662 : c’est un cadeau du très influent Mazarin à son souverain Louis XIV pour célébrer son mariage avec l’infante d’Espagne, une union qui scellera la paix entre les monarchies française et ibère. C’est d’ailleurs ce qui est explicitement rappelé dans le premier acte de l’œuvre qui célèbre l’évènement. Le cadeau est prestigieux, Mazarin choisit ainsi pour son monarque ce qu’il y a de mieux : Francesco Cavalli, le plus célèbre compositeur italien posera ses notes sur le livret signé Francesco Buti et l’on construira un théâtre aux Tuileries, rapidement nommé « la salle des machines ». Le nom dit tout : dans l’œuvre originale comme dans sa reproduction moderne, les personnages surgissent du ciel, émergent du sous-sol, apparaissent disparaissent, usant et abusant parfois du ressort desdites machines. Il y a parfois des longueurs dans l’écriture musicale d’Ercole Amante, pleine de récitatifs (la version initiale de 1662 avait déjà réduite de 5 à 4h, elle ne dure plus que 3h !) mais lorsque surgissent les airs du chœur, des trios, des quatuors, un bonheur pur se saisit du spectateur. On mentionnera ici par exemple l’air de l’ouverture interprété par le chœur dans son intégralité, le trio tout en douceur « dors, ô sommeil dors », et le plus martial « reçois ô roi ». L’orchestre dirigé par le très jeune Raphaël Pichon (35 ans) déploie également avec talent une partition souvent touffue et parfois tumultueuse. Les chanteurs sont tous impeccables et se prêtent avec talent à toutes les fantaisies de la mise en scène : c’est chargé, coloré et parfois kitsch mais qu’importe. Comme l’écrivent les deux metteurs en scène Valérie Lesort et Christian Hecq, « nous avons respecté le livret à la lettre… ou presque ». Alors, devant autant d’audace et de talents réunis, pourquoi, le critique un peu ronchon ne lâcherait-il pas prise pour profiter en toute simplicité de ce foisonnement d’images et de gags tous plus imaginatifs les uns que les autres ? D’autant plus que tout finira bien et que « devant mille épreuves, la vertu obtient sa récompense ».
E.D
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