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Le spleen de l'ange (jusqu'au 26 octobre puis en tournée jusqu'au 15 novembre)

le  21/10/2024   au théâtre de La Ville - Les Abbesses, 31 rue des Abbesses 750&_ paris (à 20h)

Mise en scène de Johanny Bert avec Johanny Bert + 3 musiciens écrit par Johanny Bert




En 1987, Wim Wenders filmait deux anges glissant au milieu de la foule berlinoise. En 2024, Johanny Bert montre un ange survolant la foule des humains, en quête du sens de sa mission. L’inspiration du marionnettiste est affirmée et c’est la voix du cinéaste en majesté qui ouvre le Spleen de l’ange : « c’est pour montrer les hommes que j’ai inventé les anges ».
Suspendu au firmament, l’ange survole les humains, groupe anonyme défilant sans but. Tel un albatros, ses ailes trop grandes le gênent, et sa mission lui parait vaine : « Je sais tout de vos mélodrames mais sortez de moi, c’est dit, c’est fait, je démissionne ». L’ange se sent inutile, impuissant face à une humanité indifférente : « depuis combien de temps négligez-vous vos âmes ? ». Tenté de déposer ses ailes et d’emprunter des formes humaines avantageuses, l’ange poursuit sur terre sa quête de sens.
Nimbé de mystère et dans une pénombre qui ne laisse presque rien deviner de ceux qui l’animent, l’ange qui souhaiterait tellement être déchu, chante, et pose son spleen sur les notes des trois superbes musiciens qui soutiennent cette œuvre artistique ambitieuse. Magie des images, beauté des nappes musicales, le « Spleen de l’ange » est un spectacle fascinant, mais pas forcément optimiste dans le regard qu’il porte sur une humanité négligente.
On avait fait la connaissance de Johanny Bert avec « Hen », une sorte de cabaret déluré mettant en scène une créature hybride et hypersexué. Le voici qui prend délibérément le chemin de la poésie et de la magie créative. Certains de ses tableaux sont stupéfiants même si l’on se prend parfois à se demander comment ça marche, sortant l’espace d’un instant de la fascination que provoque la vision de cette créature. On retourne cependant très vite dans l’état de quasi-sidération qu’inspire « Le spleen de l‘ange », un spectacle qui donne à Johanny Bert l’occasion de déployer son talent technique et artistique.
On ne donnera pas ici la morale de cette histoire, et le spectateur découvrira lui même le sort de l’ange. On mentionnera toutefois une scène de l‘épilogue (le spectacle est organisé en tableaux chapitrés) : sorti de sa pénombre, et muni d’une existence propre, l’ange regarde son créateur manipulateur, il nous regarde, et le miracle a lieu : il vit !

Eric Dotter



 
 
 
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