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Leurs enfants après eux

Sortie  le  04/12/2024  

De Ludovic et Zoran Boukherma avec Paul Kircher, Angelina Woreth, Sayyid El Alami, Gilles Lellouche, Ludivine Sagnier et Anouk Villemin


Août 92. Une vallée perdue dans l’Est, des hauts fourneaux qui ne brûlent plus. Anthony, quatorze ans, s’ennuie ferme. Un après-midi de canicule au bord du lac, il rencontre Stéphanie. Le coup de foudre est tel que le soir même, il emprunte secrètement la moto de son père pour se rendre à une soirée où il espère la retrouver. Lorsque le lendemain matin, il s’aperçoit que la moto a disparu, sa vie bascule.

Cela fait un bail qu’un tel film n’avait pas été produit et réalisé avec autant de générosité, de brillance et de réussite, aussi bien du côté de la mise en scène très soignée – grâce notamment aux 2 frères jumeaux, Ludovic et Zoran Boukherma (on leur doit déjà Willy 1er, Teddy et L’année du requin) - que de celui du casting plutôt convaincant – des pointures comme des nouvelles têtes - et bien sûr du choix judicieux du scénario – une adaptation d’après le roman éponyme de Nicolas Mathieu, publié aux éditions Actes Sud et Prix Goncourt en 2018. Bref, tout est là pour faire de cette production l’un des meilleurs longs-métrages qu’il nous a été donné de voir depuis un bon bout de temps !
Et ce ne sont pas les 2h25 que dure cette histoire qui pourraient nous effrayer par sa durée et nous empêcher d’apprécier à sa juste valeur cette œuvre, d’autant que le bon déroulement de cette trajectoire adolescente puis adulte sur quelques années mérite vraiment le déplacement. Quelle sincérité de ton et quelle justesse de sentiments ! Comment ne pas tomber sous le charme de l’acteur principal, Paul Kircher (vu dans Le lycéen et Le règne animal), avec sa tronche de jeune dégingandé, un peu ailleurs et mal dégrossie ? Comment ne pas être touché par la prestation touchante de Gilles Lellouche – qui fait ici aussi office de producteur – en père alcoolo aussi défaillant qu’agressif ? Et comment ne pas être surpris de voir Ludivine Sagnier jouer une mère poule - et populo -, quelque peu dépassée, voire sans autorité et un peu borderline sur les bords ? Il ne faut pas s’étonner de les admirer jouer de la sorte puisqu’ils vivent dans une ville de l’Est de la France (en Lorraine), une de celles qui a vu ses habitants touchés de plein fouet par la crise économique et la fermeture des grands fourneaux sidérurgiques.
Quoi qu’il en soit et quoi qu’on en dise, cela ne les empêche nullement de s’ennuyer – sauf nous, spectateurs - comme de faire la fête, gloussant (ah, les premiers émois !), fumant, buvant et sniffant lorsque les occasions se présentent (et il y en a !). Il faut préciser que là où ils vivent, il y a un peu de tout socialement parlant : des bourges, des familles monoparentales, des enfants désœuvrés, mais aussi des immigrants et des azimutés. Et l’on prend la température de ce beau monde en pleine émancipation sur le mode de rendez-vous manqués et de destins croisés à travers des chroniques successives tout en douceur entre 1992 et 1998. D’où une BO d’époque bien branchée, tour à tour rock (Red Hot Chili Peppers ; Aérosmith ; Texas) et variété bien de chez nous (Goldman ; Boney M ; Cabrel ; Pagny ; Johnny ; plus une belle version instrumentale au piano de « I will survive »). En résumé, tous les ingrédients sont réunis pour faire de cette création cinématographique assez contemplative l’un des prochains succès au box-office.

C.LB



 
 
 
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