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Et si c’était elle ? (jusqu’au 28 mars)
le 17/01/2025
au
théâtre Montmartre Galabru, 4 rue de l’Armée d’Orient 75018 Paris (tous les vendredis à 21h30)
Mise en scène de Pascal Bendavid avec en alternance Nawelle Evad, Laura Bernard ou Adèle Bloch-Mazier, et Hugo Hamdad, Bastien
Fontaine-Oberto ou Jérémy Barrière écrit par Franck Buirod
Ca aurait pu être un RDV comme un autre, un « date » sans conséquence. D’un côté, il y a Franck, une sorte de looser, dragueur, menteur qui va de rencontre en rencontre, autant pour le sexe que pour le toit, car il est sans domicile fixe. De l’autre, il y a Léopoldine, Lélé pour les intimes, posée et intelligente. Attablée dans un café, elle attend celui à qui elle a semblé plaire sur l’appli de rencontres. C’est vrai qu’elle est fort jolie. Mais ils ont du mal à se retrouver dans le café. Lui : « je ne te vois pas, dans le café, il n’y a qu’une handicapée en fauteuil roulant ». Mais voilà, l’handicapée, c’est elle, une jolie jeune fille frêle aux longs cheveux ondulés, un sourire (et quel sourire !) accroché au visage. Alors, Franck sourit en retour, plus par gêne que par envie de séduire, car pas questions pour lui de sortir avec une handicapée : « quand je te regarde, je pense à tout sauf au sexe », et, comme si ça ne suffisait pas, il en rajoute : « et puis, qu’est-ce que je vais bien pouvoir raconter à mes potes ! ». Mais, Léopoldine a beau être une mince jeune fille élancée, les pieds recroquevillés sur les cales pieds de son inséparable fauteuil, elle n’en a pas moins de la répartie. S’ensuivront de tumultueux et irrésistibles échanges à l’issue desquels le séduisant Franck emménagera chez Lélé pour ne pas rester sans toit. Le pacte est donnant/donnant : elle le loge et il est son homme à tout faire. « Tu as les jambes, j’ai l’argent », balance-t-elle à l’indélicat. On les retrouvera ainsi tout au long de la pièce, lui indéfectible clown et elle, jeune fille lumineuse et déterminée à aller jusqu’au bout de ses rêves. Ce qu’il adviendra ensuite, nous le laissons découvrir au spectateur, même si le titre « et si c’était elle ? » nous donne quelques indices Un peu réticent à la perspective d’un discours lénifiant sur l’inclusion des handicapés, le spectateur découvre un séduisant numéro de duettistes. L’humour est omniprésent et souvent mordant. Franck est plus qu’inélégant et Léopoldine réplique du tac-au-tac. Elle en a vu d’autres que ce lourdaud en jogging. On rit donc souvent, et on réfléchit tout autant, comme lorsque Lélé explique à Franck qu’elle ne verrouille jamais sa porte d’appartement car le verrou est placé trop haut pour qu’elle puisse l’atteindre, assise dans son fauteuil roulant. Les deux rôles étant joués en alternance par six comédiens, ça n’est qu’à titre indicatif que l’on mentionne le talent des deux présents le soir de notre venue. Hugo Hamdad incarne avec justesse un Franck qui en fait toujours trop et Nawell Evad une Lélé ferme et élégante. Balance parfaite entre l’humour et le sérieux, « et si c’était elle ? » joue la carte de la sincérité et atteint son but : nous faire rire et nous émouvoir dans un même mouvement.
Eric Dotter
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