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Le dernier cèdre du Liban (jusqu’au 28 décembre)

le  26/09/2025   au théâtre de l’Oeuvre, 55 rue de Clichy 75009 Paris (du mercredi au samedi à 21h – à partir du 09/10 à 19h - et dimanche à 15h30)

Mise en scène de Nikola Carton avec Magali Genoud, Maëlis Adalle et Azeddine Benamara écrit par Aïda Asgharzadeh




Une jeune fille, Eva. Elle a à peine 16 ans. Révoltée de nature, voire de naissance, elle rejette toute autorité, celle de son psychologue, celle de son éducateur... Dans ce CEF (centre éducatif fermé) où ses écarts l’ont menée, Eva, l’enfant abandonnée par une mère trop occupée, se débat avec la vie. Les circonstances de sa venue au monde vont lui être soudainement rappelées. Anna sa génitrice, vient en effet de mourir. Pour tout héritage, elle lui a laissé un coffret contenant un enregistreur et un lot de cassettes sur lesquelles elle se raconte.
Après un prélude mettant en place l’action, deux récits parallèles vont se dérouler, celui de la file et celui de la mère, celui d’une jeune fille de 16 ans qui se cherche dans la colère et celui d’une femme reporter de guerre traversant les pays en conflit. L’une est soudain encombrée d’un passé dont elle ne veut pas, tandis que l’autre s’est débarrassée d’une enfant qui encombrait sa vie sans attaches. Une narration vécue en direct, une autre narrée sur cassettes, les deux jouées sur le plateau en parallèle, voici le prétexte dramaturgique posé.
Sur le plateau, la jeune fille et la femme se croisent sans se parler bien sûr mais se partagent le même espace de jeu. C’est peu dire que la vie d’Anna la mère reporter est trépidante. De guerre en guerre, de boîte de nuit en lieu d’enlèvement, le moteur de la reporter photographe, c’est de saisir l’humain dans l’objectif de son appareil photo. Elle, qui préfèrerais de loin « mourir avec des gens que [je] ne connais pas ». Parfois, le doute l’étreint devant une scène poignante mais tellement photogénique, « Si tu ne te protèges pas, le regard d’un enfant s’accroche à toi comme une sangsue ». Quid donc de ses rencontres alors ? Il y a bien un amant de passage (le père de sa fille ?). Mais « pas d’échange de cartes ni de prénoms », ou si peu.
Du Liban, de Sabra et Chatila à la guerre en Serbie, c’est tout un pan de l’histoire que la jeune fille va découvrir, indissociable de la vie d’une mère qu’elle écoute ainsi sur les bandes d’un vieux dictaphone. Si la mère et la fille sont jouées par deux comédiennes Magali Genoud et, Maëlis Adalle, qui conservent leur rôle tout au long de la pièce, offrant un jeu honnête et parfois émouvant, toute une série de personnages secondaires (le copain d’Eva dans son centre, le psychologue, l’éducateur, l’amant d’Anna) sont tous joués par un seul et même comédien, Azeddine Benamara
Le texte est là, parfois touchant, notamment lorsque la jeune fille découvre réellement qui était vraiment sa mère. Même s’il ne développe aucun effet de style, il impose par sa simplicité une narration évidente et nous offre une intrigue limpide. Hélas, la mise en scène est plate et banale, la multiplication de séquences venant casser le rythme de la narration. On se prend souvent à songer à ce qu’un autre metteur en scène plus inspiré aurait pu tirer de ce récit à deux voix (plus les rôles secondaires, non négligeables). Hélas encore, la scénographie est fort encombrée, imposant au spectateur une sorte de fouillis d’objets censés aider le récit mais ne faisant que la distraire.
Fort heureusement, il y a les comédiennes, intenses, parfois un peu caricaturales (pas évident de jouer la colère sans crier et d’incarner la baroudeuse sans jouer la femme blasée) et surtout le comédien. Azeddine Benamara, tantôt psy, tantôt copain de galère d’Eva, tantôt amant, qui joue de son corps massif mais souple et de sa voix grave mais douce pour proposer toute une palette de nuances théâtrales. Une belle distribution qui parvient presque à sauver le spectacle.

Eric Dotter



 
 
 
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