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Les caprices de Marianne (jusqu’au 30 novembre)

le  14/11/2025   au théâtre Artistic Athévains, 45bis rue Richard Lenoir 75011 Paris (mercredi et jeudi à 19h, vendredi et samedi à 20h30, mâtinées samedi à 17h et dimanche à 15h)

Mise en scène de Philippe Calvario avec Zoé Adjani, Mikaël Mittelstadt ou Pierre Hurel, Philippe Calvario, Christof Veillon, Delphine Rich et Hameza El Omari écrit par Alfred de Musset




Marianne est une jeune et jolie femme un peu collet montée, très attachée à tenir son rôle de (trop) jeune épouse de Claudio, un mari juge de profession et (trop ?) âgé. Mais voilà que ses pas croisent ceux du jeune Coelio dont le cœur se retourne à la vue de la dame fort mariée. Pour tenter de séduire Marianne, Coelio envoie Octave son ami un peu fantasque, plaider sa cause auprès de la dame, ce qu’il fera de bonne grâce : « je te jure que Marianne sera à toi et à personne d’autre ».
Mais nous sommes en plein romantisme (la pièce parait en 1833) et forcément, rien ne se passe comme cela devrait se passer, et Marianne, toujours fidèle à son rôle d’épouse parfaite, éconduit le messager qui plaide la cause de son ami comme si elle était la sienne. Mais, si Coelio ne présente aucun intérêt à ses yeux, cet Octave la laisse décidément songeuse au point qu’elle lui fixe un RDV, sans apparente intention coupable, quoique. Hélas, le juge, époux de Marianne, est suspicieux et, convaincu que sa femme a pris amant, fait garder la demeure conjugale. Voilà qui fera bouillir le sang de Marianne au point que, folle de rage, elle défiera le sort de lui faire prendre n’importe quel amant, sauf Coelio.
On ne révèlera pas plus ici la suite de l’intrigue pour ne pas gâcher le plaisir de ceux et celles qui ne connaitraient pas encore la pièce : tout au plus peut-on dire que de comédie légère et mutine, « Les caprices de Marianne » se muent en drame. Le metteur en scène a choisi de faire jouer ses comédiens dans une cage de scène complètement ouverte, occupée en son centre par une belle structure mobile représentant les différents lieux (taverne, domicile des époux) où se déroule l’action. Hélas, dans les premières minutes de la représentation, les voix se perdent un peu et si Octave (Philippe Calvario qui assure aussi la mise en scène) s’en tire à peu près, le diaphane Coelio (joué par Pierre Hurel) est quasi transparent, vocalement comme physiquement.
Deux scènes viennent fort heureusement contredire cette première impression fort mitigée. La première, évoquée plus haut, met en scène Octave déclarant par procuration l’amour de Coelio à et pour Marianne : le jeu des deux comédiens y magnifie le texte de Musset tout en finesse. L’ambassadeur y est plus que le porteur d’un message et l’on comprend aisément le trouble de la belle Marianne. Quant à la deuxième, elle met face à face Coelio, le fils et sa mère, Hermia (interprétée avec tact par Delphine Rich). La femme y révèle à son fils, un drame d’amour vécu autrefois. Scène secondaire mais indispensable à la progression de l’action, elle préfigure le sort funeste que subira Coelio et installe une véritable émotion sur plateau.
Réservons le mot de la fin à l’héroïne, Marianne. Elle est belle et convaincante, forte dans la colère comme dans le désespoir, et c’est Zoé Adjani qui porte le rôle-titre sur ses jeunes épaules. Elle rend tout à fait crédible le métamorphose de l’épouse réservée en femme révoltée, et c’est elle qui fait ressortir la véritable nature de la pièce de Musset, un texte féministe avant l’heure. Qu’on ne se trompe pas, malgré le titre, Marianne n’est pas une femme « capricieuse », le caprice ici prend la signification italienne du « capriccio », la révolte en vue de se libérer.
Alors, ne serait-ce que pour voir une belle et sainte colère du XIXème siècle, pourquoi n’iriez-vous pas voir justement « Les caprices de Marianne » ?

Eric Dotter



 
 
 
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