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Les 4 sœurs

Sortie  le  04/07/2018  

De Claude Lanzmann avec dans leur propre rôle Paula Biren, Ruth Elias, Ada Lichtman, et Hanna Marton


Paula Biren, Ruth Elias, Ada Lichtman, Hanna Marton, quatre noms et prénoms de femmes juives; témoins et survivantes de la plus folle et de la plus impitoyable barbarie, et qui, pour cette seule raison, mais beaucoup d'autres encore, méritent d'être inscrites à tout jamais dans la mémoire des hommes.

4 interviews « souvenirs » équivalents à 4 témoignages cruciaux de femmes, rares rescapées de ce que fut la Shoah, le plus grand génocide de tous les temps ! 4 histoires qui ne peuvent que nous (re)plonger à nouveau dans l’horreur autant des ghettos que des camps de concentration, questionnées par le réalisateur Claude Lanzmann - grand spécialiste en la matière (on lui doit notamment les films/documentaires tels que le célèbre Shoah, ainsi que Sobibor ; 14 octobre 1943, 16 heures ; Lights & shadows ; et Le Dernier des injustes) - et racontées face caméra par chacune des intervenantes ! Impossible de ne pas être à la fois particulièrement captivé et profondément touché par ce que ces femmes nous racontent et par ce qu’elles ont vu et vécu ou plutôt subit et enduré, lors de l’invasion des allemands dans leur pays respectif (la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Hongrie) jusqu’à la libération, en passant par leur cauchemar en déportation !
Ces récits de différentes longueurs (entre 1h30 et 50 minutes), autour de leur parcours – parfois encore incompréhensible pour certains d’entre nous -, et de leur destinée on ne peut plus exceptionnelle – fruit du hasard dû à leur jeune âge (elles avaient entre 17 et 19 ans à l’époque), coup de chance incroyable ou alors de prise de risques inconsidérés grâce à leur courage et afin de garder espoir en la vie -, furent filmés il y a environs 30 ans et déjà en partie inclus dans son fameux « monument du cinéma » de 9 heures intitulé Shoah. Cette fois-ci, le réalisateur leur consacre 4 films bien distincts pour chacune d’entre elles. Que ce soit Le serment d’Hippocrate, Baluty, La puce joyeuse ou bien alors L’arche de Noé, ce sont leur description des faits en cette période trouble, leur confrontation imminente avec la mort qui rode, leur instinct de survie chevillé au corps et à l’âme, leur rencontre avec des êtres tour à tour diaboliques (le docteur Mengele, un homme au demeurant fort « charmant et plein de bonnes manières » mais si absorbé par ses « recherches » et autres expérimentations !) et secourables (cette femme « médecin » qui a sauvé l’esprit tourmenté et dépressif de l’une d’entre elles).
Que dire de plus qui n’a déjà été moult fois (re)présentées à l’écran ? Excepté quelques brèves photos d’archives montrées ici et là assez rapidement, l’ensemble des témoignages parlés – dont 2 trajectoires encore inédites - est quoi que l’on puisse en dire très poignant, ressentis au plus profond de nous-mêmes comme de ces « victimes » qui le relatent le plus simplement du monde et le décrivent le plus clairement qui soit, tout en se confiant à Lanzmann qui sait être discret lorsque la narration se fait parfois plus dure, plus sensible (comme cette femme qui se juge de manière rationnelle après avoir fait partie de la force de police juive dans le ghetto de Baluty, quartier pauvre à Lodz coupé du reste du monde).
Malgré un côté statique de la mise en scène, on ne peut que rester concentré et, il faut bien l’avouer aussi, abasourdi à l’énoncé de certaines situations effroyables (tels que celle où cette revenante d’origine polonaise s’est retrouvée tour à tour bannie par les occupants allemands puis, à son retour dès la fin de la guerre, bannie par les polonais eux-mêmes)....

C.LB



 
 
 
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