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The house that Jack built

Sortie  le  17/10/2018  

De Lars von Trier avec Matt Dillon, Bruno Ganz, Uma Thurman, Siobhan Fallon, Sofie Grabol, Riley Keough et Jeremy Davies


États-Unis, années 70. Nous suivons le très brillant Jack à travers cinq incidents et découvrons les meurtres qui vont marquer son parcours de tueur en série. L'histoire est vécue du point de vue de Jack. Il considère chaque meurtre comme une œuvre d'art en soi. Alors que l'ultime et inévitable intervention de la police ne cesse de se rapprocher (ce qui exaspère Jack et lui met la pression) il décide - contrairement à toute logique - de prendre de plus en plus de risques. Tout au long du film, nous découvrons les descriptions de Jack sur sa situation personnelle, ses problèmes et ses pensées à travers sa conversation avec un inconnu, Verge. Un mélange grotesque de sophismes, d’apitoiement presque enfantin sur soi et d'explications détaillées sur les manœuvres dangereuses et difficiles de Jack.

On le sait maintenant depuis longtemps, un film de Lars von Trier ne laisse jamais personne indifférent, qu’on (l’)aime ou qu’on (le) déteste ! Son fond de commerce, c’est interpellé le spectateur à travers plusieurs procédés narratifs et techniques (visuels, sonores, scénaristiques....) afin de (vouloir) le faire réagir, le provoquer et même le choquer parfois - pardon, souvent - avec des images hallucinantes de réalisme comme de violence et de cruauté, qui deviennent vite insoutenables lorsqu’il décide d’aller encore plus loin que ces confrères et consœurs. On décèle d’ailleurs assez rapidement sa façon de filmer, reconnaissant au passage sa fameuse pâte dès les 1ères minutes, cette caméra/reportage à l’épaule plutôt hésitante et furtive qui zoome un peu vite, de manière brutale et saccadée, cette photo pas toujours très léchée voire même approximative, entrecoupée de travellings impeccables et de plans somptueux (autour notamment de l’esthétisme de « La Divine Comédie » au final), ainsi que d’images d’archives plus ou moins récentes (avec un petit penchant pour quelques extraits d’Hitler : on ne se refait pas, n’est-ce pas ?), histoire d’étayer au maximum son propos cinématographique « inspiré ».
Ne soyez donc pas étonné de découvrir sa nouvelle production autour de plusieurs étapes clés d’un serial-killer – tel un journal raconté sur une douzaine d’années -, un ingénieur/architecte intelligent et sérieux mais particulièrement névrosé et méticuleux (lorsqu’il est question de nettoyage) - sous les traits inattendus de Matt Dillon -, à l’attitude bizarre, aux propos dérangeants (et limite soporifiques parfois lorsque, par exemple, il se confesse à une sorte de « conscience » invisible en voix off), à l’allure de vieux garçon coincé, au regard perçant, bref, obsédé par son « travail » bien fait sous toutes ses « coutures ». Que ce soit sa 1ère victime, une femme aussi insistante qu’insupportable (Uma Thurman méconnaissable – et pour cause par la suite ! -) ou sa dernière prénommée « Simple », il exécute minutieusement ses proies – et même des enfants - avec un goût certain pour la mise en scène ignominieusement macabre, n’évitant jamais de pousser encore plus loin le bouchon en exhibant ces cadavres dans des positions considérées comme œuvres « artistiques ».
Passé ce constat, on est juste un tant soit peu étonné de voir que le réalisateur s’est laissé aller à dépeindre des futures défuntes « martyrisées » spécialement naïves et presque consentantes (elles ne se débattent jamais ou alors à peine), à permettre à son « héros » principal à la fois perfectionniste, tourmenté, coriace et implacable – un psychopathe à la Barbe Bleue et aux rêves de grandeur qui stocke ces « viandes » dans un grand local frigorifique - d’expliquer son geste tout en divaguant pour ne pas dire délirant sut son rapport avec l’art (que de blablas incessants sur ses méthodes « appliquées » très personnelles !), et à offrir aux nombreux protagonistes qui peuplent son long métrage la possibilité d’improviser ici et là leurs propos et autres faits et gestes. Cette autopsie de meurtres – ainsi que de son meurtrier - méritait amplement plus de tenue au niveau de l’écriture comme des évènements que cette complaisance malsaine, de pensées « lumineuses » et de visions « sophistiquées » que ce pensum sans véritable logique si ce n’est celle d’être insoutenable parfois, bêtement provocant et jamais distancié, ennuyeux à force et lourd à digérer (2h30 tout de même !), et cela malgré une BO éclectique tour à tour classique et rock (du David Bowie). Comme quoi, encore une fois, Lars von Trier ne laisse pas insensible...

C.LB



 
 
 
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