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The mountain : une odyssée américaine

Sortie  le  26/06/2019  

De Rick Alverson avec Jeff Goldblum, Tye Sheridan, Denis Lavant, Udo Kier, Hannah Gross, Amy Stiller et Eleonore Hendricks Gross


États-Unis, années 50. Le Dr. Wallace Fiennes emploie Andy, un jeune homme introverti, comme photographe pour documenter sa méthode de lobotomie, de plus en plus controversée. Au fur et à mesure de leur expédition d’asile en asile, Andy, témoin de l’effritement de la carrière et de la vie du docteur, va peu à peu s’identifier aux patients. À leur arrivée dans une petite ville de montagne, berceau du mouvement New Age, Andy et Wallace font la rencontre d’un guérisseur français peu conventionnel et de sa fille.

Le réalisateur, scénariste – et musicien - américain Rick Alverson (Entertainment ; The comedy) doit beaucoup aimer la peinture, c’est certain, à voir ses « tableaux » quasi-statiques et très épurés, d’un beige neutre ou d’un gris terne flagrant voire d’une pâleur évidente et même d’une blancheur irréelle, à l’image de sa mise en scène esthétisante et ultra-stylisée avec un grain si particulier. C’est tellement poussé à l’extrême qu’on pourrait croire à un exercice de style léché à outrance où les dialogues et les mouvements de caméra sont bannis. Il n’en est rien puisque il y a des échanges certes discrets et pour le moins sporadiques limite décalés, et des travellings on ne peut plus lents pour ne pas dire lymphatiques.
On voit également que son soucis du détail, notamment dans la reconstitution d’un passé révolu - celui des fifties -, est scrupuleusement respecté à la lettre, musique d’ambiance comme chansons monotones d’antan d’ailleurs. Ses personnages sont d’autant plus figés, comme prisonniers du cadre, qu’ils évoluent dans un monde ouaté, plus proche de la photo d’Epinal glacée que du film en pleine action. Bref, c’est étrange et beau à la fois. On se demanderait presque si ce n’est pas un caprice voulu, celui de garder absolument ce désir à représenter les protagonistes dans un état d’attente constante, de torpeur ambiante, voire végétatif.
Et puis ce choix de casting plus ou moins inattendu et parfois même incongru qui évolua dans une atmosphère quelque peu artificielle, où Jeff Goldblum en lobotomiseur controversé sur le déclin côtoie Tye Sheridan (vu dans The tree of life, Mud, et Ready player one) en portraitiste sensible, timide et effacé, à l’allure plutôt triste, à la présence passive et au comportement particulièrement réservé, où Hannah Gross (aperçue dans Her smell et Mindhunter) en jeune et jolie folle est la fille de Denis Lavant (qui nous fait son cirque de possédé à la fois physiquement et vocalement, un verre constamment vissé à la main !), où Udo Kier (Suspira ; Du sand pour Dracula) joue le père furtif et fuyant de cette dernière (disparaissant assez rapidement de l’écran pour cause de décès prématuré dans le scénario) !
En résumé, une œuvre « romantique » assez spéciale, à la fois intense et formelle, autour du récit d’un rêve utopique, tournée par un cinéaste ambitieux et fort inspiré, bien loin des productions commerciales actuelles, peu enclin à attirer un grand nombre de spectateurs mais qui ravira (as)sûrement un public de connaisseurs...

C.LB



 
 
 
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