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Un automne à Great Yarmouth

Sortie  le  06/09/2023  

De Marco Martins avec Nuno Lopes, Beatriz Batarda, Kris Hitchen, Peter Caulfield et Hugo Bentes


Octobre 2019, en Grande-Bretagne, trois mois avant le Brexit. Tânia organise le travail, transport et logement des travailleurs immigrés portugais de l’usine de volailles de Great Yarmouth, dans le Norfolk. Flottant dans un monde où les bâtiments sont délabrés et les conditions de travail des ouvriers à l’abattoir particulièrement dures, Tânia apprend l’anglais en rêvant d’ouvrir un jour un hôtel pour y accueillir les touristes du troisième âge.

Le portrait assez poignant, sans concession ni compromis, d’une femme pour le moins fatiguée, voire usée, limite ravagée, pas loin d’être anéantie par le boulot que son « salaud de » mari lui inflige, celui de gérer au mieux des hommes et des femmes d’origine portugaise (comme elle d’ailleurs), venus chercher un « eldorado » dans cette région reculée de l’Angleterre, tout en exploitant ce trafic d’humains miséreux et en volant au passage son époux, un violent alcoolique qui passe son temps à jouer – et à perdre- à des jeux de courses de lévriers. Elle propose cette main-d’œuvre à un abattoir qui ne veut pas « d’histoire », la logeant à plusieurs par chaque chambre au sein d’un taudis miteux aussi crade que glauque.
L’atmosphère est installée, à la fois sombre, sale et crasseuse, avec (très) peu d’espoir qu’elle s’éclaircisse à un moment ou à un autre. Seule la présence d’un bel immigré (interprété par Nuno Lopes, vu dernièrement dans Azuro et Tout le monde aime Jeanne) lui fera croire à une vie meilleure, le temps de lui faire miroiter un possible nouvel avenir. Mais cette « maman » pour les uns (jouée par Beatriz Batarda, aperçue dans Frankie Wilde et Train de nuit pour Lisbonne), légèrement tarée et « salope » pour les autres, n’a qu’un rêve, celui de rénover son propre hôtel. Et ce n’est malheureusement pas ce qui semble se profiler à l’horizon, du moins, le sien !
Filmé comme un reportage sur les conditions laborieuses de vie de certains ouvriers, ce drame sous-jacent possède le même regard perdu, hagard et harassé que celui de ces ouvriers, ressemblant à l’image de ces pauvres bêtes (des dindons) qu’ils zigouillent et désossent à longueur de journée. Même la voix off, qui se juxtapose sur ces images « sanguinolentes », reflète une dureté émanant de l’ensemble. Et la BO particulièrement obsédante n’arrange rien à l’affaire. Bref, une représentation de « chiffres provisoires » - c’est le non donné à cette main-d’œuvre - qui ne laisse rien présager de très bon ni de très joyeux outre-Manche !

C.LB



 
 
 
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