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Et plus si affinités

Sortie  le  03/04/2024  

De Olivier Ducray et Wilfried Meance avec Isabelle Carré, Bernard Campan, Julia Faure et Pablo Pauly


Usé par vingt-cinq ans de vie commune, le couple formé par Xavier et Sophie semble à bout de souffle. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’idée de Sophie d’inviter à dîner leurs voisins, Adèle et Alban, n’enchante pas Xavier. Il reproche à ce couple, visiblement très amoureux, son manque de discrétion, surtout la nuit ! Au contact de ces voisins aux mœurs débridées, Xavier et Sophie vont devoir se confronter à leur réalité, avant d’être poussés dans leur retranchement par une proposition quelque peu… indécente.

Le film espagnol « Sentimental » de Cesc Gay (tiré de sa propre pièce intitulée « Les voisins du dessus »), dont est adapté ce remake hilarant en version française, respecte à la lettre l’unité de lieu – un appartement bourgeois - comme de temps – court, environs 1h20 -, le nombre d’intervenants – 4 protagonistes, 2 femmes, 2 hommes -, le sens de la mise en scène – très rythmée -, et le sujet – un dîner entre 2 couples avoisinants qui va vite tourner au vinaigre -. D’ailleurs, ce huis clos tragi-comique est à déguster comme un bon vaudeville théâtral, tant les côtés légers, divertissants et fertiles en rebondissements sont légions ici.
Pour que la sauce prenne parfaitement, il fallait un casting à la hauteur du projet et on peut dire sans détour que la réussite vient beaucoup de l’alchimie entre les 4 actrices/acteurs, tou.te.s très convaincant(e)s. C’est donc l’occasion de retrouver Isabelle Carré et Bernard Campan qui avaient déjà servi ensemble dans la comédie cinématographique La dégustation (sortie en 2022) : elle, sensible et touchante comme à son habitude et d’une exquise douceur, alors que lui, déjà bien « aigri » à l’époque, est cette fois, encore plus faux-(et coincé du)cul, odieux, bref, caustique et sarcastique que jamais. Ils se complètent à merveille, d’autant qu’ils se complaisent à jouer un ménage routinier en pleine crise (« fait qu’on est l’air d’un couple ! »), en pleine remise en cause face au tandem déluré interprété par Julia Faure (Camille redouble ; Le daim ; Fumer fait tousser ; Coma) aux ébats déchaînés et aux mœurs libérés, ainsi que Pablo Pauly (La fille de Brest ; Patients ; Trois jours et une vie ; Murder party), énervant en crâneur prétentieux, un peu lourd pour ne pas dire suffisant mais néanmoins hilarant.
N’oublions surtout pas les dialogues avec des textes certes irrévérencieux et décomplexés mais aiguisés à souhait qui sont d’une écriture imparable, d’une justesse d’esprit, d’une précision à toute épreuve et d’une efficacité redoutable. C’est une suite de mauvaise foi affichée, de pics bien envoyés (et « sans filtre »), de reproches longtemps inexprimés, de jeux de mots « métaphoriques » savoureux, de sous-entendus on ne peut plus « tendus », en résumé, un festival de langues qui se délient, de secrets qui se dévoilent et de masques qui tombent. On en redemanderait tant ça fuse du tac-au-tac : c’est qu’on navigue au même niveau que « Le prénom » !
Ca fonctionne tellement bien que le film a remporté – et c’est hautement mérité ! – plusieurs prix au dernier festival de comédie de l’Alpe d’Huez : Prix du public, Prix spécial du jury et Prix d'interprétation féminine et masculine pour Isabelle Carré et Bernard Campan. Et ce n’est pas uniquement parce que ce dernier se balade dans le plus « simple appareil » !

C.LB



 
 
 
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