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Alexandre (sur Ciné + Frisson)

Sortie  le  04/12/2022  

De Oliver Stone avec Colin Farrell, Angelina Jolie, Val Kilmer, Jared Leto, Anthony Hopkins et Jonathan Rhys Meyers (sur Ciné + Frisson les 04, 07, 11 et 14/12)




Autant que vous le sachiez tout de suite, ce film raconte l’histoire d’Alexandre Le Grand, depuis sa prime jeunesse jusqu’à sa mort en passant par ses nombreuses conquêtes territoriales ! Pour monter cette imposante production autour de ce personnage mythique de l’Antiquité, il fallait la stature d’un réalisateur chevronné comme Oliver Stone, souvent habitué à des projets imposants comme ce fut le cas avec Salvador, Platoon, Wall Street, The Doors, Tueurs nés, Entre ciel et terre, ou encore L’enfer du dimanche. Mais il fallait également l’expérience d’une mise en scène pointilleuse et minutieuse, ce qu’il nous avait déjà démontré avec des films tels que JFK et Nixon qui dépeignaient avec subtilité la personnalité de certains grands de ce monde. Il est vrai que l’envergure de cette histoire pour le moins palpitante demandait la maîtrise d’un réalisateur tel que lui. Fort de cette prouesse aussi bien technique que narrative, puisque Oliver Stone est aussi un grand scénariste (L’année du dragon, Scarface, Conan le barbare) et qu’il a récolté pour cette fresque toutes les informations existantes sur Alexandre, plongeons-nous dans cette tragédie grec qui nous permettra de découvrir un jeune homme héroïque dont nous avons tant entendu parler et dont nous ne savons si peu de choses !
Si on sait qu’Alexandre a conquis une bonne partie de la Méditerranée et de l’Asie, on ne connaît pas spécialement ce qui motivait cet homme plein de folies des grandeurs, qui réalisa nombre de ses rêves avant de mourir précipitamment à 32 ans. En tant que brillant chef militaire, il réussit à étendre son empire, comprenant tout ou partie des territoires qui composent aujourd’hui la Grèce, l’Albanie, la Turquie, la Bulgarie, l’Egypte, la Libye, Israël, la Jordanie, la Syrie, le Liban, Chypre, l’Irak, l’Iran, l’Afghanistan, l’Ouzbekistan, le Pakistan et l’Inde, et tout cela sans perdre une seule bataille. Par contre, en tant que visionnaire doté d’une remarquable générosité d’esprit, on découvre derrière ses réflexions, ses stratégies et ses interrogations, d’autres choses plus personnelles comme sa mégalomanie et même ses crises d’hystérie, ainsi que certaines très intimes comme son homosexualité et ses penchants pour le moins exacerbés vis-à-vis de la gente masculine, et cela malgré la découverte et les tentations d’un harem au sein du palais royal de Babylone. Et sur ce dernier point, on peut dire que Oliver Stone s’étend un peu trop, genre péplum gay à la Spartacus !
Il est vrai que voir Colin Farrell, teint en blond, habillé en jupette et orné d’un casque à double plumet, ne laisse aucun doute sur ses désirs amoureux. C’est ainsi que nous avons le droit autant à ses fascinations qu’à ses déchirements, tels les éternelles turpitudes rencontrées habituellement dans pareille circonstance. Bref, si vous voulez tout savoir sur la vie certes extraordinaire mais mouvementée d’Alexandre, ne manquez pas ce film biographique, quasi « autobiographique » !
Pour ceux qui s’attendent à voir de l’action avec des combats sanglants à la Troie, ou bien une mise en scène consistante et bien ficelée comme l’était Gladiator, ils vont être plutôt déçu puisque nous sommes ici à l’opposé de ce type de films. A part l’attaque contre l’armée perse du roi Darius et le combat final contre les éléphants cuirassés indiens, il n’y a pas d’autres scènes véritablement prenantes et rythmées, sauf pas mal de tergiversations entre les différents proches d’Alexandre et beaucoup de blablabla pour nous narrer ses périples. Au lieu de cela, on a le droit autant aux doutes et faiblesses d’Alexandre qu’à ses ambiguïtés, un moyen comme un autre de parler de la bisexualité de ce héros comme trait particulier de son caractère. Quand à l’histoire en elle-même, elle s’étire sur 2h50, ce qui fait un peu long tout de même et trop consistant pour nos petites prunelles. En plus, il vient se greffer là-dessus un narrateur soporifique, Ptolémée âgé, un des plus fidèles généraux d’Alexandre, néanmoins incarné par le prestigieux Anthony Hopkins qui pour l’occasion a pris un sacré coup de vieux.
En tant que rétrospective historique sans concession, on ne peut que féliciter le travail précis et méticuleux de Oliver Stone qui a su retranscrire à l’écran les frasques épiques de ce conquérant hors norme et ambitieux qui changea la nature du monde tout en étant un névrosé obsessionnelle qui voulait repousser les frontières de son empire au-delà de celles conquises par son père, Philippe de Macédoine. Là où le bas blesse, c’est dans le choix de certains acteurs tels qu’Angelina Jolie en Olympias, mère passionnée d’Alexandre, sexy en diable mais incapable de vieillir en 25 ans d’histoire, elle qui n’a pas encore 30 ans. Autre type de critiques pour Jared Leto (Le patchwork de la vie, Requiem for a dream, La ligne rouge, Fight club, Panic room, Une vie volée) dans la peau d’Héphaïstion, le plus fidèle général d’Alexandre et son « plus proche ami » aussi, voire son seul vrai compagnon, tout comme d’ailleurs Cassandre, « l’ami d’enfance », interprété par Jonathan Rhys Meyers (Michael Collins, Chevauchée avec le diable, Joue-là comme Beckham) qui jouent tous les 2 des efféminés de service avec beaucoup de conviction. Le seul qui réussit un véritable tour de force dans une transformation aussi incroyable que méconnaissable est Val Kilmer qui a grossit de plusieurs kilos pour interpréter le rôle du rustre Philippe II, roi borgne de Macédoine et père autoritaire d’Alexandre.
Même entouré par une fine équipe, Oliver Stone n’a pas réussit à insuffler un souffle épique nécessaire à toute fresque de cet acabit, certes spectaculaire et mémorable dans cette rétrospective humaine et imposante d’un réalisme certain, mais qui aurait mérité qu’on palpite, qu’on vibre et qu’on tremble un peu plus devant des batailles moins sporadiques et des discussions moins omniprésentes. En vérité, on a plus l’impression d’assister à un cours d’histoire sur Alexandre et son époque que de visionner un film à grand spectacle, exotique et pour le moins palpitant. Il semble que le réalisateur ait voulu faire spécialement plaisir à son conseiller historien sur le tournage en reconstituant point par point les différentes scènes de la vie d’Alexandre et en lui faisant revivre sous ses yeux les authentiques combats qu’il avait 30 ans plus tôt écrit dans une biographie complète.
Toutefois, on ne peut qu’applaudir l’énorme et complexe travail du réalisateur qui a du se battre 3 ans durant pour accoucher de ce projet historiquement fidèle, démesuré et éprouvant, qui tente de transcender l’Histoire pour mieux en faire resurgir une vision d’auteur, celle du réalisateur. N’oublions pas tout de même que, de son côté, notre fameux Alexandre a réussit à accomplir bien plus en seulement…8 ans de campagnes !

C.LB



 
 
 
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