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OSS 117 : Le Caire, nid d’espions (sur Canal + Cinéma)

Sortie  le  06/02/2023  

De Michel Hazanavicius avec Jean Dujardin, Bérénice Béjo, Philippe Lefèbvre, Aure Atika, Constantin Alexandrov et Said Amadis (sur Canal + Cinéma les 06, 07, 08, 12, 13, 17 et 18/02)


Egypte 1955. Le Caire est un véritable nid d’espions. Tout le monde se méfie de tout le monde, tout le monde complote contre tout le monde : anglais, français, soviétiques, la famille du roi déchu Farouk qui veut retrouver son trône, les Aigles de Kheops, une secte religieuse qui veut prendre le pouvoir….Le président de la République Française, monsieur René Coty, envoie son arme maîtresse mettre de l’ordre dans cette pétaudière au bord du chaos : Hubert Bonisseur de la Bath, dit OSS 117.(voir la BO dans la rubrique Sorties musicales)

Ce n’est pas tous les jours qu’on a la chance de rire de bon cœur et surtout aussi souvent ! Voir les aventures d’un agent secret français à la personnalité aussi prétentieuse que suffisante, empêtré dans ses préjugés de petit français arrogant, prêt à en découdre avec d’autres espions tout aussi caricaturaux et ridicules que lui, est vraiment à mourir de rire, et pourtant pas si loin du véritable OSS 117 décrit par Jean Bruce dans ses nombreux romans d’espionnage (265 en tout !). Ce dernier avait en effet imaginé un espion viril et séducteur, américain d’ascendance française, employé à l’Office of Strategic Service (l’ancêtre de la CIA), un peu à l’image de James Bond qui lui n’est apparu que quelques années plus tard. Pour son héros valeureux, il avait imaginé des histoires rocambolesques à travers le monde entouré de jolies filles, histoire de faire un peu exotique et de pimenter l’ensemble d’un zeste d’érotisme bon teint.
Mais, sous la houlette du réalisateur Michel Hazanavicius (Mes amis), ce OSS 117 est quelque peu différent, une sorte de playboy macho et trop sûr de lui, misogyne et homophobe, condescendant vis-à-vis des peuples colonisés et incapable d’avoir des déductions raisonnées, baratineur de pacotille et dragueur impénitent, pas très futé et véritable fouteur de pagaille en série lorsqu’il débarque en conquérant dans un pays qu’il ne connaît pas. Pour endosser ce rôle comique traité au premier degré, le réalisateur a fait appel à Jean Dujardin, plus vrai que nature avec les mimiques de circonstance et l’allure athlétique à la Sean Connery (d’ailleurs, à bien le regarder, Jean Dujardin l’a copié beaucoup, s’étant maquillé et grimé de la sorte pour lui ressembler !). C’est qu’il fallait parodier au mieux cet agent secret aussi grotesque qu’atypique pour accepter le côté dérisoire de son personnage, tout en respectant l’intégrité du style d’une époque, celle des années 50 et 60, sans tomber toutefois dans la caricature grossière à la San Antonio. Après l’énorme réussite de Brice de Nice, on peut estimer que Jean Dujardin a trouvé ici nouvelle chaussure à son pied dans ce nouveau challenge digne d’être relevé. Il ne serait d’ailleurs pas étonnant qu’il soit capable de renouveler haut la main un 2ème succès avec cette adaptation loufoque et décalé d’un héros de roman.
Tout comme Jean Dujardin, les autres comédiens sont assez représentatifs d’une certaine image de ses films d’espionnage de série B qu’on tournait en noir et blanc et d’une façon toujours très kitch, voire exotique, à la fin des années 50 et au début des années 60. Bérénice Béjo (Meilleur espoir féminin, Chevalier, Comme un avion, Le grand rôle, Sans elle, Cavalcade) joue avec le recul nécessaire l’apprentie espionne avec beaucoup de conviction et de justesse, tout comme Aure Atika (La vérité si je mens 1 & 2, Bimboland, Trafic d’influence, La faute à Voltaire, Le convoyeur, De battre mon cœur s’est arrêté) qui interprète une femme fatale et de surcroît princesse nymphomane, sexy en diable. Mais la palme revient sans équivoque à Jean Dujardin qui nous offre un festival d’expressions et de réparties plus croustillantes et drôles les unes que les autres. Il est tellement crédible dans son personnage qu’il irradie littéralement à l’image, portant ce film de bout en bout, présent sur chaque plan du film et s’en donnant à cœur joie dans des combines manquées et des jeux de mots douteux. De plus, il est servi par des dialogues savoureux, décalés et franchement hilarants (bravo au scénariste Jean-François Halin !), pas loin d’ailleurs d’un certain Jacques Audiard.
Un grand bravo également au travail fait sur la photo qui est un vrai défi visuel, restituant et respectant le style très coloré d’une époque, ainsi que son esprit, son ambiance et ses teintes, notamment dans les flash-back et les scènes d’action un peu désuètes. On peut dire la même chose concernant le soucis qui a été apporté aux détails des costumes et des accessoires qui semblent sortir tout droit de la penderie de nos parents. Au final, le charme démodé et l’humour contemporain opèrent dans cette comédie décalée et détournée, à la fois drôle et élégante, qui joue à fond avec les codes des livres de Jean Bruce, et qui fait la part belle autant à l’atmosphère des classiques d’une certaine période cinématographique qu’à la nostalgie du technicolor, qu’on retrouve notamment dans les premiers James Bond !

C.LB



 
 
 
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