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Le royaume (sur Ciné + Premier)

Sortie  le  17/02/2023  

De Peter Berg avec Jamie Foxx, Jennifer Garner, Chris Cooper, Jason Bateman et Ashraf Barhom (les 17, 18, 20 et 28/02 + 05, 06 et 09/03)


Riyad (Arabie Saoudite). Un attentat des plus sanglants jamais perpétrés contre les occidentaux fait plus de 100 morts et 200 blessés parmi les employés de la société pétrolière Gulf Oasis et leurs familles. Tandis que les bureaucrates de Washington discutent « droit d’ingérence » et « territorialité », l’agent du FBI Ronald Fleury et les membres de sa section d’intervention : le spécialiste en explosifs Grant Sykes, le médecin légiste Janet Mayes et l’agent de renseignement Adam Leavitt, négocient un discret voyage de 5 jours en Arabie Saoudite pour identifier le cerveau de l’attentat. Dès leur arrivée au Royaume, Fleury et les siens sont confrontés à l’hostilité des saoudiens qui prétendent mener seuls l’enquête. Entravés par un protocole tatillon et pressée par le temps, les 4 agents comprennent qu’ils doivent gagner au plus tôt la confiance de leurs homologues saoudiens, aussi décidés qu’eux à retrouver les terroristes. Fleury déniche un interlocuteur de bonne volonté en la personne de leur « ange gardien », le colonel Al Ghazi. Celui-ci assiste l’équipe dans ses investigations sur la scène de crime, tout en facilitant ses délicates négociations avec les autorités locales. Unissant leurs efforts, l’Arabe et l’Américain découvrent que l’attentat préfigure une série d’attaques imminentes de grande envergure, et qu’ils sont devenus la première cible d’une mystérieuse cellule extrémiste. Une course contre la montre s’engage….

Voici un royaume où il ne fait pas bon vivre, ni même voyager, vu les conditions dans lesquelles ces quelques « ressortissants » américains sont accueillis là-bas ! C’est à croire que l’Arabie Saoudite et ses habitants sont sur le pied de guerre en permanence, cachant quelques « Ben Laden » locaux dans leurs entrailles, se baladant armés jusqu’aux dents et stockant un véritable arsenal militaire chez eux ! Attention, ne vous méprenez pas, nous avons à faire à une fiction car le pays qui est visé à travers ce film imaginaire (et néanmoins tellement réaliste), c’est plutôt l’Irak. Pourtant, on se croirait presque en plein conflit palestino/israélien, côté bande de Gaza, ou revenu au temps des guérillas locales dans certains quartiers malfamés américains, style Harlem, mais ici en beaucoup plus virulent et violent qu’à l’époque. Il suffit de voir comment les mitraillettes, les grenades et les lance-roquettes parlent, servant plus de moyens de trancher dans le vif que de tenter de discuter à tête reposée.
C’est d’ailleurs un bel inventaire qu’on nous présente ici, étalé tout au long de ses 1h50 d’enquête rondement menée et de fusillades quasi non-stop. On dirait un film reportage sur ce qui se passe en ce moment au Moyen-Orient, une sorte de documentaire à la manière de Michael Winterbottom dans Un cœur invaincu, pris dans le feu de l’action et sous les tirs nourris, sur les exactions commises par des terroristes qui n’ont semble-t-il pas peur de mourir pour une bonne cause, voire une « juste » cause comme ils disent (« Allah est grand »). Ces kamikazes qui se font sauter parmi la foule rappellent étrangement la phobie qu’ont les américains depuis le 11 septembre et surtout depuis le début du conflit irakien. On voit aussi se profiler les premiers attentats d’Al Qaïda en 1996 contre les forces américaines basées à Khobar en Arabie Saoudite, ainsi que ceux au Yémen et en Afrique orientale, avec les images de ces bâtiments éventrés par l’énorme déflagration de l’explosion au début.
Il était donc évident de voir apparaître à un moment ou à un autre sur les écrans de cinéma, des scénarios traitant de ce problème, au même titre que les scénaristes s’étaient défoulés au moment de la guerre du Vietnam. Même combat à l’aveuglette, mêmes innocents qui trinquent, même bourbier inextricable et mêmes atrocités commises ! Le nom de Rambo n’est pas loin, il est d’ailleurs mentionné dans le film ! N’empêche que Stallone était tout seul contre tout le monde et que là, ils sont 4 pour tenter de localiser le ou les responsables d’un attentat-suicide qui a fait plus d’une centaine de victimes parmi leurs compatriotes. Jamie Foxx (Collateral, Miami vice, Dreamgirls) continue à jouer au chef de section comme dans Jarhead, autre pamphlet sur la guerre du Koweït cette fois-ci, certes avec beaucoup de conviction, d’énergie et de franc parlé (comment il parle au Prince !), mais surtout avec la manière forte, dite expéditive. Avec ce genre d’ennemi, on ne palabre pas, on tranche, pardon, on perce dans le lard jusqu’à l’éclabousser de sang !
Escortés par Chris Cooper (Adaptation, American beauty, Pur-Sang la légende de Seabiscuit, Syriana – qui se déroulait déjà au Moyen Orient -, La mémoire dans la peau et La mort dans la peau), la petite touche sympathique et décontractée, de Jennifer Garner qui promène un peu trop en avant sa « féminité » dans un pays en tchador et qui tente de se refaire une santé cinématographique après les niaiseux Daredevil, 30 ans sinon rien et Elektra, et de Jason Bateman (Allumeuses, Starsky & Hutch, Dodgeball, La rupture, Mise à prix) qui fait son entrée dans une grosse production en se faisant copieusement malmener tel un otage torturé (une expérience qu’il n’est pas prête d’oublier et nous non plus !), Jamie Foxx sait plus ou moins à quoi s’attendre et nous aussi par la même occasion. C’est évident que dès les premières images, celle de l’explosion dévastatrice, on ne va pas en rester là, surenchère oblige, et qu’il va y avoir juste derrière d’autres représailles et de nouveaux attentats perpétrés. Sur ce point, on est d’accord.
Mais que le film tourne ensuite à une course/poursuite mouvementée (on sent la patte du producteur et réalisateur Michael Mann), à un carnage terrible (bonjour les impacts !) et à des règlements de compte ensanglantés sur fond de tirs omniprésents, style vengeance implacable dans une version western bien trash, à travers les rues de Riyad avec le mea culpa final sous forme de condoléances attristées, c’est un peu excessif et même carrément cynique. Même le diplomate envoyé de l’ambassade des Etats-Unis à Riyad, qui tente de calmer le jeu, n’a pas peur d’être ridiculisé, certes assez crédible dans un rôle tête à claques mais pas drôle pour 2 sous. A nouveau, c’est la représentation de la supériorité U.S. qui ressurgie, aussi bien dans la puissance (de feu) que dans la victoire écrasante (à la fois guerrière et intellectuelle), ainsi que dans l’image des bons (américains), toujours prêts à rendre service, contre les méchants (arabes), des bouseux pas civilisés qui ne pensent qu’à s’étriper !
Dans le lot, il en faut au moins un qui soit gentil, honnête, loyal et serviable, interprété par Ashraf Barhom (Intervention divine, La fiancée syrienne), bien évidemment aux ordres de ces impérialistes américains pour ne pas qu’on ait une image trop négative de ce pays (et de beaucoup d’autres également !). Ce dernier n’aura pas le temps de fraterniser avec les agents du FBI puisqu’il doit disparaître de gré ou de force (il y a une justice tout de même !), avec les félicitations de circonstance auprès de ses proches (on n’est pas des barbares !). Bref, ce film de guerre dramatique, tourné dans la précipitation visuelle, n’est qu’un prétexte à montrer la suprématie et la force de frappe pour le moins évidente (puisque démontré ici à l’écran, si si !) de 4 enquêteurs américains face à une armada de musulmans fanatiques aussi bien, voire mieux armés qu’eux, et à présenter la grande présence d’esprit comme les dons de réflexion et de déduction qu’ils peuvent avoir en pareille situation, les seuls capable de trouver les protagonistes de ce massacre avant tous les autres (encore bravo les gars du FBI !).
En résumé, un thriller d’action au message politique, à la fois musclé et décomplexé, qui ne s’embarrasse pas de fioritures mais de pas mal de préjugés, réalisé par l’acteur Peter Berg (Very bad things, Bienvenue dans la jungle, et aperçu notamment dans Collateral et Mise à prix) moins convaincant dans le résonnement moral que dans la mise en scène spectaculaire, plein de « bad guys » face à peu de « good boys », histoire de prouver au reste du monde que lorsque les américains débarquent, c’est pour laver l’affront en nettoyant de manière radicale, et pour que tout rendre dans l’ordre sans jamais penser à arrondir les angles ni à faire dans la dentelle. On ne s’étonnera pas après cela de voir qu’ils ne sont pas toujours appréciés avec leurs soi-disant « justes » valeurs lorsqu’ils arrivent de façon « inopinée » dans un conflit quelque part dans le monde, comme on a pu le voir entre autre dans certaines régions d’Amérique Centrale et du Sud ! Ah, quand les intérêts U.S. sont en jeu, rien ne va plus…..

C.LB



 
 
 
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