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Les femmes de l’ombre (sur Canal + Grand Ecran)

Sortie  le  14/11/2023  

De Jean-Paul Salomé avec Sophie Marceau, Julie Depardieu, Marie Gillain, Deborah François, Maya Sansa, Moritz Bleibtreu, Julien Boisselier et Vincent Rottiers


Engagée dans la résistance française, Louise s’enfuit à Londres après l’assassinat de son mari. Elle est recrutée par le SOE, un service secret de renseignement et de sabotage piloté par Churchill. Dans l’urgence, on lui confie sa première mission, l’exfiltration d’un agent britannique tombé aux mains des allemands alors qu’il préparait le débarquement sur les plages normandes. L’homme n’a pas encore parlé mais le temps presse. Louise doit d’abord constituer un commando de femmes spécialement choisies pour les besoins de l’opération. Pour le recrutement, tous les moyens sont bons : mensonges, chantage, remises de peine. Elle engage Suzy, danseuse de cabaret qui excelle dans l’art de séduire les hommes, puis Gaëlle, chimiste, spécialiste en explosifs ; et enfin Jeanne, prostituée, capable d’assassiner de sang froid. Parachutées en Normandie, elles sont rejointes par Maria, juive italienne, opérateur radio et dernière pièce du dispositif. La mission commence bien mais se complique très vite. Contraintes de retourner à Paris, le SOE leur fixe un nouvel objectif, presque suicidaire : éliminer l’une des pièces maîtresses du contre-espionnage nazi, le colonel Heindrich. L’homme en sait déjà trop sur les préparatifs du débarquement. 5 femmes, loin d’être des héroïnes, mais qui vont le devenir.

Rendre un vibrant hommage à ces femmes combatives, à la fois courageuses, téméraires et même héroïques, engagées volontaires dans la Résistance contre l’ennemi pendant la 2ème guerre mondiale, partait plutôt d’un bon sentiment de reconnaissance et de devoir « patriotiques », ainsi que d’un sérieux travail de la mémoire historique ! Par contre, se limiter à n’en dépeindre qu’une infime représentation certes soignée mais fugace de l’Occupation à travers une longue et minutieuse reconstitution sur fond d’une assez belle photo mais souvent figée de Paris (entre l’hôtel Regina et la place de La Concorde, plus le métro !), ne se bornant qu’à mettre bout à bout une suite de saynètes poussives, de situations évidentes et de dialogues plats, n’était pas la meilleure façon de leurs rendre service et surtout le meilleur moyen pour qu’on puisse se remémorer avec respect leurs faits d’armes, et vibrer à leurs nombreux exploits comme à leurs actes de bravoure ! Commencer le film par une Sophie Marceau en tireuse d’élite (!!) peu crédible et hésitante, qui recule son visage et ferme les yeux à chaque fois qu’elle tire avec son fusil, n’est pas très démonstratif de la femme dite vaillante, ni très judicieux vis-à-vis de l’image qu’on peut avoir de ces femmes déterminées qui se sont pour certaines sacrifiées pour libérer la France de l’occupant !
Non, franchement, il ne semble pas que ce soit une très bonne idée d’avoir montré quelques-unes de ces résistantes sous les traits éhontés, exagérés, grossiers et parfois ridicules, de 4 comédiennes aux motivations puériles, légères et pour le moins frivoles, plus à même de se crêper le chignon, de changer de robe, de lever la jambe ou de danser en dévoilant leurs seins qu’à faire vraiment la guerre aux allemands. On en apprend plus sur elles, leurs sentiments et leurs émotions, que comment se battre pour sauver la France. Il faut les voir dire non constamment, faire la moue pour un rien, bouder quand quelque chose ne leur plaît pas, rouler des billes grosses comme çà lorsque l’étonnement se présente, pour se rendre compte que ni le casting ni la réalisation ne sont convaincants. C’est à croire que le principe de cet imposant long métrage historique (2h) a pour but de réunir côte à côte 4 vedettes plus ou moins connues, histoire de voir ce qu’elles donnent ensemble, avec en toile de fond une vague épopée dramatique qui se déroule en 1944.
Malheureusement, le résultat ne dépasse pas le stade du simple exercice de style, de la petite production bien proprette et bien sage, sans trop d’action soutenue ni de violence outrancière, avec des actrices sans charisme qui jouent pour la plupart mal ou pas dans le ton, le tout sous le couvert d’un polar tragique comme on nous en pond régulièrement au cinéma et à la télévision. On a du mal à croire que Sophie Marceau interprète une chef de mission sans pitié et de surcroît une battante enceinte et à toute épreuve (même celle de la torture) ; Marie Gillain, une belle plante empotée (la remplaçante au pied levé de Laura Smet qui a dû sentir le vent venir lorsqu’elle s’est retirée du projet mais qui fait tout de même une très courte apparition au bar de l’hôtel !) ; Déborah François (L’enfant, La tourneuse de pages), une cul bénie patentée (mais souvent la poitrine à l’air ou bien nue, les bras en croix) ; et Julie Depardieu, une gouailleuse de service, fantasque et goguenarde (bien que cela lui aille comme un gant).
Face à elles, des méchants nazis (Moritz Bleibtreu aperçu dans Munich, Les particules élémentaires et Le concile de Pierre) pourtant bien élevés et serviables à souhait mais au regard noir hyper souligné et très appuyé pour ne pas qu’on se trompe sur leur compte au cas où ! On peut dire que la mise en place de Jean-Paul Salomé est assez laborieuse et pas du tout palpitante (souvenez-vous du pas très bon Belphégor en 2001 avec déjà Sophie Marceau et du mauvais Arsène Lupin !), cadrée de façon traditionnelle mais trop ampoulée et sans véritable intrigue ni réel suspense, montée chronologiquement avec un souci du détail très précis à la place d’une vraie direction d’acteurs maîtrisée. C’est vrai qu’on sent ce groupe de femmes un peu perdues, voire esseulées, prêtes à rendre service mais ne sachant pas comment s’y prendre, parachutées ici et là avec un vague cas de conscience à régler dans cette grande épopée militaire qui semble nettement les dépasser.
Là-dessus, viennent se greffer quelques moments soi-disant forts, sensés donner du rythme à l’ensemble, tel un rapport houleux entre frère et sœur (qui tombe comme un cheveu sur la soupe !), un strip-tease improvisé (et ça se voit !), un malaise inopportun (bien que !), un bref combat au couteau avec un allemand (une cascade affligeante !), quelques tirs à la mitraillette et une image revue et corrigée du Christ sur la croix (sacrilège !). On aura vraiment du mal à donner une seconde chance à ce soi-disant thriller psychologique pour le moins prévisible, enlisé dans un bourbier narratif lancinant au profit d’une reconstitution extrêmement pointilleuse et minutieuse qui magnifie une époque un peu trouble et difficile.
Cela fera sans doute plaisir à quelques seniors nostalgiques, aux vieux de la vieille qui reconnaîtront çà et là quelques accessoires et autres vestiges de cette guerre (autos blindées, uniformes clinquants, panneaux en allemand, ambulances militaires), mais il n’est pas sûr que cela fasse la joie des plus jeunes, à la recherche d’un peu plus d’énergie, de vivacité et surtout d’action et de combats. Bref, ce n’est pas avec ce film de guerre qu’on va rendre les honneurs dus à ces espionnes françaises, c’est certain !

C.LB



 
 
 
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