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Les autres (sur Canal + Grand Ecran)

Sortie  le  05/08/2023  

De Alejandro Amenabar avec Nicole Kidman, Fionnula Flanagan, Christopher Eccleston, Elaine Cassidy et Eric Sykes


Ile de Jersey, 1945. La seconde guerre mondiale est terminée, mais le mari de Grace n’est pas revenu du front. Dans un immense manoir isolé, la jeune femme élève désormais seule ses 2 enfants selon les principes stricts de sa religion. Sa fille et son fils souffrent d’une étrange maladie : ils ne peuvent être exposés à la lumière directe du soleil. Lorsque 3 nouveaux domestiques viennent habiter avec Grace et ses enfants, ils doivent se plier à une règle vitale : la maison doit être constamment plongée dans la pénombre, et aucune porte ne doit être ouverte avant que la précédente n’ait été fermée. Pourtant, l’ordre rigoureux instauré par Grace va être défié par des intrus…

Ce scénario est une fable effrayante, un conte de terreur psychologique qui aborde les thèmes de la confiance, la crainte et la foi. Méticuleusement construit, nimbé d’une atmosphère étrange et angoissante, ce film n’est pas s’en rappeler Le 6ème sens dans sa construction et son montage : sans vous dévoilez la fin de cette histoire palpitante et sans rentrez dans les détails, sachez seulement que nous sommes placé ici dans une situation particulière où il s’agit de la frayeur d’être mort chez les non-vivants. Vous n’en saurez pas plus ! Voici le premier film américain d’Alejandro Amenabar (Tesis, Ouvre les yeux), un jeune réalisateur espagnol imaginatif et original qui a su se démarquer de ses confrères. En effet, il possède une incroyable capacité à construire un vrai suspense, une angoisse qui vient du cœur et de l’esprit. Comme à son habitude, il installe dans chacune de ses productions une ambiance, inspirée par le fantastique et le surnaturel, lui qui a toujours été fasciné par les peurs et surtout celles enfantines. Considéré comme un expert dans l’art du thriller, il s’ancre dans la réalité pour mieux nous terrifier. Son film est en fait hanté par des corridors interminables, plongés dans les ténèbres, en hommage à ces êtres au visage jamais dévoilé qui peuplaient les couloirs des cauchemars de notre enfance. Souvenez-vous de votre peur du noir, peur des portes à demi-ouvertes, peur des placards, peur de tout ce qui pouvait dissimuler quelqu’un ou quelque chose. Il traite ici de l’occulte d’une façon extrêmement intense. Nous acceptons de nous laisser submerger par cette frayeur, jusqu’à ce que notre sécurité soit remise en question et là, le film devient terrifiant. D’ailleurs, on sursaute ! Pour lui, le suspense ne peut être créé qu’en jouant sur l’atmosphère et la psychologie, et non en faisant appel à des effets spéciaux superficiels. Au lieu d’utiliser ces derniers qui transformeraient le frisson désirée en répulsion, son style nous permet de faire naître la véritable horreur d’un emballement de l’imagination. Il sait mettre une bonne dose d’anxiété, d’obsessions et de paranoïa latentes. Il porte en plus un regard nouveau sur le mythe de la maison hantée : les personnages ne sont ni des héros, ni des méchants, ce sont des êtres humains ordinaires qui s’efforcent de comprendre une situation remettant en cause tout ce en quoi ils croient. C’est Nicole Kidman qui interprète la jeune mère dévouée qui élève seule ses enfants dans une atmosphère de peur de la guerre. Elle va abandonner toutes ses croyances et ses peurs pour pénétrer au royaume du surnaturel. Nicole Kidman est d’ailleurs parfaite en femme complètement disjonctée et maniaque, bigote et cul serrée, au point qu’on aimerait lui flanquer une bonne claque pour qu’elle se calme. Elle ressemble tellement à Grace Kelly (d’où son nom dans le film et sa grâce naturelle aussi !) par moment, et même à Deborah Kerr, qu’on se demande si le réalisateur ne serait pas laisser inspirer par le maître incontesté du suspense, Alfred Hitchcock ! Toute cette histoire respire étrangement le monde de la peur comme savait si bien l’installer ce réalisateur de thriller émérite. Nicole Kidman nous donne ici une véritable leçon de nuance, de tenue et de maintien dans ce rôle qu’elle transcende complètement du début à la fin. Elle incarne une gamme très variée d’émotions intenses, et elle a cette force dans le regard qui éclipse bien des paroles ou des dialogues : il suffit de voir la terreur se lire à travers ses yeux pour comprendre. Quand on vous disait que c’est une grande actrice ! Fionnula Flanagan (With or without you) en servante dévouée, Christopher Eccleston (Petits meurtres entre amis, Jude, Existenz, 60 secondes chrono) en père énigmatique et Eric Sykes (Ces merveilleux fous volants dans leurs drôles de machines) en jardinier nonchalant sont autant de personnages mystérieux qui viennent troubler l’existence de cette femme. Quant aux 2 enfants, Alakina Mann et James Bentley, leur recherche ayant pris 7 mois et même s’ils n’ont aucune expérience d’acteur, ils correspondaient à l’essence même de l’histoire, avec leur sens expressif, leur propre mystère et leur côté intrigant. Ils ont quelque chose de sauvage et de magique, allié à une discipline intérieure et à une maturité étonnantes pour leur âge. Ils sont différents des enfants que l’on voit dans les films d’horreur. Ils partagent une certaine alchimie avec Nicole Kidman. Parallèlement à la terreur subtile, essentiellement psychologique, le réalisateur a forgé l’atmosphère angoissante du film par la lumière et le travail de la caméra. La maison où vivent Grace et ses enfants semble miroiter d’ombres mouvantes et de mouvements soudains profondément déstabilisants. On passe d’un rythme calme et paisible à un rythme qui trahit l’appréhension, puis la panique, et le résultat est une perte de la notion temporelle, comme si les personnages avaient pénétré dans une zone floue, étrangement hors du temps. Le manoir est aussi un personnage à part entière : elle baigne dans des ombres grises aux couloirs infinis plongeant dans l’obscurité, et c’est dans ces espaces sombres et vides que nous nous heurtons aux choses qui nous effraient le plus. Bref, voici un film inquiétant, surprenant et diabolique, qui vous tiendra en haleine du début à la fin. Une bonne surprise de fin d’année !



 
 
 
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