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L’homme aux 1000 visages

Sortie  le  12/04/2017  

De Alberto Rodriguez avec Eduard Fernàndez, José Coronado, Marta Etura, Carlos Santos, Luis Callejo et Jimmy Shaw


Francisco Paesa, ex-agent secret espagnol, est engagé pour résoudre une affaire de détournement d’argent risquant d’entrainer un scandale d’Etat.
L’homme y voit l’opportunité de s’enrichir tout en se vengeant du gouvernement qui l'a trahi par le passé.
Débute alors l’une des plus incroyables intrigues politiques et financières de ces dernières années : l’histoire vraie d’un homme qui a trompé tout un pays et fait tomber un gouvernement.


Accrochez-vous bien, c’est à l’air comme ça plutôt complexe schématiquement parlant et assez ardu à suivre, limite confus au point de se perdre - ça discute d’ailleurs beaucoup ! - et, en plus, ça dure 2 bonnes heures ! Loin de vous faire peur ou de vous détourner d’une telle histoire inspirée de faits réels qui se sont déroulés dans les années 80 et 90, il faut tout de même reconnaître que ce polar, certes quelque peu alambiqué par moment, est néanmoins pertinent, parfaitement précis, bien ficelé et particulièrement soutenu, de par notamment une narration en voix off qui nous resitue ici et là en grandes parties cette énorme voire cette démentielle affaire financière à travers les nombreux évènements, circonstances, stratégies, manœuvres, agissements, manigances et autres embrouilles survenus par l’entremise de son principal protagoniste ainsi que par les différents intervenants issus de son vaste réseau complice.
Et dire que quasiment tout cela est vrai, que ce soient les commissions versées, la corruption ambiante, les détournements et extorsions de fonds réservés de l’Etat, l’évasion pour ne pas dire la « disparition » de capitaux transitant via des paradis fiscaux par un cheminement tortueux plus ou moins douteux, bref, les « prêts », les « reventes » et les « rachats » entrepris afin de « protéger » au mieux cet argent qui va voyager entre l’Espagne, la France, Genève, Singapour et même parfois bien ailleurs ! On a du mal à imaginer qu’un milliard et demi de pesetas a pu circuler ainsi grâce surtout à un homme « providentiel » spécialement méthodique, dit aussi « de la situation » (interprété par l’imperturbable, discret et bienveillant Eduard Fernández, vu entre autres dans Che – 2ème partie, Biutiful, et La piel que habito), capable d’avoir pu monter une pareille escroquerie sans que personne ne puisse douter, ni le soupçonner et encore moins l’arrêter.
Un peu fort de café, non ? Et pourtant, comment ne pas rester scotché à ce récit vengeur en forme de puzzle labyrinthique ou bien de « parcours initiatique » - si vous préférez, l’art et la manière de gagner de l’argent en arnaquant sournoisement et en mentant effrontément aux gens - qui nous présente tout un tas de ramifications et de malversations qui ont réussi à éclabousser autant le gouvernement en place de l’époque que l’opposition, ainsi que la famille royale ? Un nœud gordien qui semble finalement tout simple quand on le voit se dénouer petit à petit à l’écran, avec cette mécanique bien huilée et surtout cette façon à la fois fluide, débonnaire et placide de « prendre les devants » en transférant des sommes aussi colossales que celles-ci sans l’ombre d’un ennui ou d’un problème à l’horizon. A croire que tout était quasiment possible en ce temps-là !
S’il semble régner ici un climat de paranoïa et d’immoralité aigues sur fond d’une certaine lenteur scénaristique, d’humour noir bien senti et de tension presque palpable chez beaucoup des instigateurs et comparses, tous fumant tous « comme des pompiers », on le doit au réalisateur espagnol Alberto Rodriguez qui a su miraculeusement restitué, aux détails près et enjeux à la clé, l’atmosphère poignante du livre de Manuel Cerdan (El espia de las mil caras), lui qui nous avait déjà étonné en bien avec l’excellent thriller La isla minima, récompensé de 10 Goyas en 2014 (l’équivalent de nos Césars). En résumé, encore une bonne surprise en provenance de nos voisins hispaniques, elle qui ressemble pour beaucoup à ce qui se passe en ce moment chez nous...

C.LB



 
 
 
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