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Nous l’Europe, banquet des peuples (jusqu’au 29 mai)

le  13/05/2022   au théâtre de l’Atelier, 1 place Charles Dullin 75018 Paris (du mercredi au samedi à 20h et dimanche à 15h sauf le 08/05)

Mise en scène de Roland Auzé avec la compagnie ACT plus la comédienne ukrainienne Nataliia Mazu écrit par Laurent Gaudé et Roland Auzé




Sur la scène de l’Atelier, tout commence par une apostrophe : « on n’avait pas dit non ? » ; « Comment se fait-il qu’un non se soit transformé en oui ? » ; « comment peut-on poser des questions et ne pas se soucier des réponses ? ». Même si ça n’est pas explicitement dit, le non, c’est la position des Français lors du référendum sur le traité constitutionnel européen en 2005. On connait la suite, tordant le bras à la volonté populaire exprimant un refus à 55%, la classe dirigeante et les médias vinrent à la rescousse pour expliquer aux français qu’ils n’avaient rien compris et, par un coup de baguette magique, le « non » devint un « oui ».
Partant de cet épisode fâcheux, « Nous l’Europe, banquet des peuples » va nous aider à réfléchir sur notre identité de citoyen européen : « qu’est ce qui représente le sentiment d’appartenance ? » ; « combien de cercles faut-il pour se définir, du plus grand au plus petit ? ». S’ensuivra un long et passionnant déroulé des étapes de la construction européenne, ce grand continent aux frontières mouvantes. Le spectacle ne détaille pas les étapes administratives de ce qui a construit l’Europe d’aujourd’hui mais, beaucoup plus enthousiasmant, donne des étapes historiques possibles à la constitution d’une identité européenne. Le 12 janvier 1848, esquisse du premier soulèvement qui rebondira dans toute l’Europe. Pourquoi pas ! Le 15 septembre 1830, le premier trajet de « The Rocket », la locomotive de Stephenson, qui inaugurera la civilisation industrielle européenne et les voies de circulation ? On y réfléchit.
Les errements du « vieux » continent ne sont pas oubliés. En 1885, la conférence de Berlin
réunit les parties prenantes devant « une énorme assiette « nommée l’Afrique, et le spectacle dénonce cette volonté absolue de « régner », régner sans cesse. Bien sûr, parce qu’ils ont constitué l’Europe en réaction, les conflits mondiaux ne sont pas oubliés, pas plus que ne sont omises les guerres et dictatures nationales : Les colonels en Grèce, Salazar au Portugal. Les révoltes et ses héros, tels que Jan Palach, qui s’immola par le feu devant les chars russes envahissant » sa » Prague en 1969. « Nous avons des héros qui ont dessiné une Europe plurielle », dit le texte. Et l’incarnation de cette pluralité, elle est là sur le plateau. On entend parler le portugais, l’allemand, le français, l’anglais… et aussi l’ukrainien. Car le texte est en prise totale sur l’actualité, sur celle de ceux qui frappent à sa porte, qu’ils viennent de pays en guerre ou de pays en crise économique.
Alors, concrètement, à quoi s’attendre sur la scène de l’Atelier ? Et bien, à rien de moins qu’un gigantesque foutoir bruyant, parfois joyeux, souvent révolté. On peut être hérissé par la bande son, tantôt mélopée sirupeuse entonnée par un (fort bon) contre-ténor et un chœur amateur à la limite de la justesse, et tantôt hurlée par une chanteuse gothico-rock que nous avons pour notre part trouvé fort enthousiasmante. On peut aussi reprocher au spectacle sa maladresse, sa forme vieillotte, un peu agit-prop des années 70, réunissant trop de gens sur le plateau. L’auteur de ces lignes n’a quant à lui retenu que la flamboyance du propos. Et bien que l’Europe soit née « sans que les peuples la scandent dans la rue », presque issue d’un « conseil d’administration », l’européen qu’il est avait envie à la sortie du spectacle de hurler à tue-tête dans la rue le bel hommage d’Arno (récemment disparu) à son continent « Putain, putain, C’est vachement bien, Nous sommes quand même Tous des Européens…. »

E.D



 
 
 
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