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- expo : Picasso sculpteur à la galerie de l'Institut à Paris (jusqu'au 17 décembre)

le  14/10/2022   au sein de la galerie de l'Institut, 3Bis rue des Beaux-Arts 75006 Paris

Mise en scène de Marc Lebouc, expert à la Cour d’appel de Paris, Anne-Gaëlle Lebouc et Yves Lebouc, expert à la Compagnie nationale des experts avec des sculptures écrit par ou plutôt créé par Pablo Picasso




La Galerie de l’Institut propose, dans ses deux espaces parisiens rue de Seine et rue des Beaux-Arts, une exposition-événement sur la sculpture de Picasso, réunissant quelques-uns des jalons les plus importants de son œuvre en trois dimensions.

Plus de 70 sculptures (de 1905 à 1962), accompagnées de 35 dessins et tableaux, sont réunies pour la première fois dans une galerie parisienne. Certaines d’entre elles seront mises en vente à cette occasion. Répartie en deux grands thèmes – la figure (rue des Beaux-Arts) et le bestiaire (rue de Seine) –, l’exposition « Picasso. Sculptures 1905-1962 » couvre la diversité de l’activité de l’artiste. Parmi les œuvres exceptionnelles, le public pourra notamment découvrir la première sculpture cubiste du corpus de l’artiste, une Tête de femme (Fernande), ainsi que deux têtes magistrales en tôle découpée, pliée et peinte de 1961. Il s’agit pour ces deux dernières d’un prêt exceptionnel. La célèbre Guenon et son petit présentée rue de Seine surprendra également le public.

Dans chacun des deux espaces de l’exposition (à quelques mètres l’un de l’autre), les sculptures sont accompagnées d’une sélection de tableaux et d’œuvres sur papier mettant en lumière le dialogue et la complémentarité entre les différents moyens d’expression utilisés par l’artiste. Les œuvres sur papier comprennent des dessins d’étude, de recherches, qui donnent « le mouvement de sa pensée » ; des dessins autonomes montrent la récurrence d’un thème ; des cartons et papiers découpés, constituent des maquettes pour les tôles découpées, pliées et peintes.

Autour de ce thème, l’exposition rassemble des œuvres majeures de la sculpture de Picasso, parmi lesquelles trois datent du début du siècle. La sélection comprend Tête de femme (Alice Derain) de 1905, dont les traits du visage, peu travaillés, semblent fondus. Cette œuvre fait écho à la fois au traitement inachevé de la sculpture de Rodin et au « flouté » de l’œuvre de Medardo Rosso (Ecce Puer, bronze, 1905). Femme se coiffant, l’une des premières sculptures primitivistes que Picasso exécute dès l’automne 1906 à son retour de Gosol en Catalogne où il a passé l’été, coïncide avec sa découverte de l’art ibérique et la rétrospective Gauguin au Salon d’Automne de 1906. Elle résulte du dessin intitulé La Coiffure de la même période. Tête de femme (Fernande) de 1909 occupe une place nodale à plus d’un titre dans l’œuvre de Picasso. Il s’agit en effet de la première sculpture cubiste qui déconstruit en trois dimensions le volume en facettes. Elle illustre la complémentarité et le dialogue entre la peinture et la sculpture dans sa pratique. Picasso la réalise d’après les portraits de Fernande peints au cours de l’été à Horta de Ebro, tels que celui de Fernande aux poires (New York, MoMA). La sculpture sert à son tour de modèle à une série de peintures parmi lesquelles un Portrait de Braque (Berlin, Museum Berggruen, Nationalgalerie).

Est également exposée une série de figurines effilées hiératiques dites « Femmes de Boisgeloup », exécutées à l’automne 1930, qui montrent des analogies avec l’art africain et étrusque. Elles évoquent par ailleurs la période de Boisgeloup sous un angle moins connu. Quelques mois auparavant, Picasso a fait l’acquisition du château de Boisgeloup, dans l’Eure, qui lui offre de vastes espaces pour développer sa pratique de la sculpture. Cette période, l’une des plus prolifiques, est également illustrée par une Baigneuse de 1931 aux formes biomorphiques, dans le prolongement des métamorphoses, dont on trouve des échos dans la peinture de l’artiste. Tête de femme (Dora Maar) de 1941, exemple de sa production monumentale, marque le retour de Picasso à la sculpture de grandes dimensions dans l’atelier du 7 rue des Grands-Augustins, berceau de Guernica en 1937. Une version en bronze est érigée depuis 1956 dans le jardin de l’église Saint-Germain-des-Prés à Paris.

Un ensemble de petites figures modelées dans de l’argile souple exécutées au milieu des années 1940, révèle un aspect plus confidentiel, mais tout aussi représentatif de la variété de sa production en sculpture. Femme enceinte de 1949 illustre une veine plus abstraite de son œuvre sculpté. Constituant à la fois une part importante de l’œuvre de Picasso et l’un de ses apports majeurs à la sculpture du XX e siècle, les sculptures composées d’objets usuels sont également présentées dans l’exposition avec Figure de 1935 et Personnage de 1958. Cette nouvelle technique se retrouve dans la seconde partie de l’exposition dédiée aux animaux avec la célèbre Guenon et son petit (1951).

Un nombre important de tôles découpées est exposé, notamment deux têtes magistrales de 1961 : un autoportrait et un portrait de Jacqueline, évoquant le couple, qui constituent un prêt exceptionnel. En effet, ces œuvres n’ont été que très rarement exposées.

Enfin, une sculpture-mât complète la sélection et évoque la dimension monumentale de la sculpture de Picasso interprétée par l’artiste norvégien Carl Nesjar avec le bétograve (une typologie de sculpture sur béton).

Picasso vivait entouré d’animaux : pigeons, colombes, chat, chiens – les chiens afghans Kazbec puis Kaboul. Il possédait aussi une chèvre dans les années 1950 à La Californie. Les animaux entrent dans son œuvre sculpté à Boisgeloup au début des années 1930 ; un Oiseau et une Tête de taureau en 1931 sont les premiers. L’artiste décline le thème de l’oiseau dans des matériaux et des styles différents, comme autant de variations : en bronze, en tôle pliée, en bois découpé et peint. Aux animaux familiers s’ajoute un bestiaire mythologique, auquel appartient le minotaure, figure essentielle de l’iconographie picassienne de la maturité.

Parmi les œuvres les plus représentatives de l’ensemble présenté rue de Seine, soulignons l’extraordinaire Guenon et son petit, créée en 1951, qui constitue une œuvre emblématique de l’utilisation par Picasso des objets de son entourage comme composants de la sculpture. La tête de la guenon est constituée de deux petites autos d’enfants, que Kahnweiler avait offertes à Claude – une Panhard et une Renault –, assemblées de façon à ce que l’emplacement des roues forme un cercle, les oreilles deux anses de tasses, le corps une grande jarre dont les anses évoquent les épaules, la queue un amortisseur de voiture enroulé à l’extrémité. Le Coq — présent en plâtre et en bronze –, appartient également au bestiaire de Boisgeloup et introduit le mouvement avec une grande élégance. En outre, un ensemble de taureaux fait écho à la passion de Picasso pour la tauromachie.

L’œuvre sculpté de Picasso, extrêmement riche, regroupe plus de 650 sculptures exécutées entre 1902 et le début des années 1960, avec des périodes plus denses que d’autres, notamment la fin des années 1920 et le début de la décennie suivante qui correspondent à l’époque de Boisgeloup ; ou encore la fin des années 1940, dans l’atelier du Fournas à Vallauris, période également très intense. Sa pratique de la sculpture est intimement liée à celle de la peinture. Elles entretiennent un dialogue fructueux. Ces deux moyens d’expression se nourrissent, se répondent et s’enrichissent mutuellement. L’œuvre de Picasso est indissociable de ce qu’était sa vie. Il s’est attaché en sculpture aux mêmes sujets que ceux qu’il a peints : des figures, des portraits de proches, des animaux réels ou mythologiques, des natures mortes.

Sa production s’avère d’une exceptionnelle variété stylistique et technique. Expérimentateur passionné, il ne s’est jamais rien interdit. Picasso s’est exprimé au moyen de techniques traditionnelles, le modelage, la taille directe.


Il a aussi fait preuve d’une inventivité débordante, conduit à la fois par une grande culture artistique et par une créativité foisonnante, assortie d’une liberté sans limite. Tout ce qui tombait sous son regard était susceptible de donner lieu à une idée nouvelle. Citons par exemple les statuettes étrusques reproduites dans la revue Documents de Georges Bataille (n°4, 1930) qui lui ont vraisemblablement inspiré la création des figures longilignes taillées dans le bois. « On ne pouvait pas laisser traîner un bout de ficelle sans qu’il en fasse quelque chose », rapporte Jacqueline (Jacqueline Picasso à André Malraux, La Tête d’obsidienne, Paris, Gallimard, 1974, p. 34). Songeons aux empreintes de textures de matériaux qu’il introduit dans ses sculptures, par exemple dans Femme au feuillage de 1934 (S.157), ou encore aux galets gravés dès 1937.

Partant du collage, il invente l’assemblage qu’il décline selon un nombre étendu de variations et dont il démultiplie les possibilités avec des objets du quotidien. L’immixtion de l’objet utilitaire est l’une des grandes révolutions de l’art du XX e siècle que l’on trouve chez Picasso dans Nature morte à la chaise cannée de 1912 (Paris, Musée Picasso) avant le premier ready-made de Marcel Duchamp. En 1954, Picasso crée une nouvelle typologie de sculptures, la tôle découpée, pliée et peinte. Elle le mène aux profils découpés de Jacqueline puis aux sculptures-mâts, qui sont une autre façon de montrer en sculpture différentes facettes d’un modèle.



 
 
 
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