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Car/Men (jusqu’au 4 février 2024)

le  14/12/2023   au théâtre Libre, 4 boulevard de Strasbourg 75010 Paris (du mercredi au samedi à 19h et dimanche à 16h ou 19h)

Mise en scène de Philippe Lafeuille avec les danseurs de sa cie Chicos Mambo écrit par la Cie Chicos Mambo




Remisés les collants académiques et les pointes ! Après avoir dynamité les canons de toutes les formes de danse dans son récent « Tutu » (critiqué ici), Philippe Lafeuille et les danseurs de sa compagnie Chicos Mambo s’attaquent aussi à l’opéra le plus joué au monde : Carmen. Ou plutôt Car/men devrait-on écrire en reprenant le jeu de mots du titre qui nous annonce en filigrane qu’il n’y aura sur scène que des hommes dans cette parodie.
Tout commence en effet par un ballet reprenant les codes vestimentaires de l’art andalou que Georges Bizet a su transcrire en musique et que « Car/men » traduit en danse : une danseuse sévillane (sans visage) est entourée de danseurs et danseuses gominés et/ou froufroutants, visage caché eux et elles aussi. Mais les masques une fois retirés, la confirmation tombe : un par un, qu’ils soient danseurs ou qu’elles portent robes sévillanes, tous sont des hommes ! Le spectacle fera ainsi défiler toute l’intrigue de Carmen, mettant au centre de l’action un chanteur qui alterne entre ténor et haute contre. Mantilles, torero (à l’habit qui brille de mille feux), éventail, aucun des symboles de cette Andalousie fantasmée par Bizet ne manquent à l’appel.
Les tableaux se succèdent ainsi, magnifiant les corps masculins comme Philippe Lafeuille sait si bien le faire, et alternant parodie de drame ibère et séquence de danse contemporaine. Sur fond de projection colorée et sous une lumière savamment étudiée, les danseurs de Chicos Mambo offrent leur grâce et leur puissance, alternant la danse en groupe et la mise en valeur de leur style personnel. Ils tournent et virevoltent autour de « La » Carmen, qui, alternant voix chantée suraigüe et récit parlé, déroule le récit avec talent.
Parfois, comme une irrépressible envie de faire rire saisit le chorégraphe et la ligne narrative est brisée, au détriment de la cohérence du spectacle. Parfois encore, la caricature pointe son nez au détriment de la finesse du trait esquissé par le chorégraphe et sa troupe. Parfois enfin, séduit par son motif, à l’occasion du culte rendu par l’un des personnages à un veau d’or païen, Philippe Lafeuille offre à voir le corps nu d’un de ses danseurs. C’est certes beau, mais totalement inutile et dessert presque le propos. Si Tutu, le précédent spectacle de Philippe Lafeuille offrait une série de séquences, Car/men choisit de raconter une seule histoire : celle de cette femme puissante et du drame amoureux qui se joue autour d’elle.
Et, malgré quelques défauts qui disparaitront sûrement après le rodage de la pièce (nous y étions le jour de la première), on reste séduit par la beauté de la troupe et, au moment des saluts, on a envie d’utiliser le pronom honni en s’exclamant : ciel, qu’ « iels » sont beaux !!!

E.D



 
 
 
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