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Prix no’bell (jusqu’au 25 avril puis à Avignon jusqu'au 21 juillet)

le  02/04/2024   au au théâtre La Reine Blanche, 2bis passage Ruelle 75018 Paris (mardi, mercredi et jeudi à 19h puis du 3 au 21/07/2024 au Théâtre la Reine Blanche à Avignon - Festival Off)

Mise en scène de Marie Steen avec Clémentine Lebocey, Roxane Driay et Benoît Di Marco écrit par Elisabeth Bouchaud




Depuis sa création, le théâtre de la Reine blanche s’intéresse aux sciences et à ceux et celles qui la font. Dirigé par Elisabeth Bouchaud, une physicienne, il permet à un public curieux de se familiariser avec les « sciences dures ». Passionnée par la scène, Elisabeth Bouchaud aime à mélanger les genres : elle met également sa plume à l’encrier et propose régulièrement ses écrits mis en scène dans son théâtre.
C’est une trilogie qui nous est actuellement proposée. Via trois récits proposés par la maitresse des lieux, on fait la connaissance de trois femmes oubliées et méconnues qui ont contribué à des découvertes fondamentales en physique et en médecine. Jocelyn Bell est l’une d’elle. Irlandaise née en 1943, on la découvre jeune thésarde dans son laboratoire - ou plutôt celui de son très respecté maitre de thèse Antony Hewish - en train de faire des soudures en vue d’assembler un radiotélescope destiné à observer l’activité stellaire.
Aux sollicitations de sortie de son amie et coloc, elle répond par la négative « tu crois que les quasars arrêtent d’émettre le samedi ? ». Il faut dire que Jocelyn est plus que consciencieuse, elle est toute dévouée à sa science : « Il faut être un ermite pour faire de la science », dit-elle ainsi. Et un jour, un évènement se produit, dont elle est à l’origine, et qui pourrait bien être à l’origine de la découverte des pulsars, une avancée phénoménale de l’astrophysique. Mais, étudiante, et surtout femme, Jocelyn Bell s’effacera, et le prix Nobel, qui suivra cette découverte, ira en 1974 à Anthony Hewisch. Fataliste, la jeune femme acceptera que son nom ne soit même pas mentionné.
C’est une jeune femme toujours aux aguets que nous décrit la pièce, doublement minoritaire car irlandaise et femme dans un milieu anglais et quasiment exclusivement masculin. Plongée dans le doute, elle remet sans cesse en question sa légitimité. Clémentine Lebocey incarne une Jocelyn Bell combinant fraicheur, doute et force. Roxane Driay, joue quant à elle son amie avec conviction. Quant à Benoit Di Marco, il évite la caricature en jouant un directeur de thèse un peu paternaliste. Comme souvent dans les écrits d’Elisabeth Bouchaud, on chemine avec les personnages tout en apprenant, et c’est passionnant. Vous serez sûrement très intéressés d’apprendre comment les pulsars ont été découverts parce qu’ils émettaient un signal régulier, comme une sorte de RDV pris avec la scientifique.
Si le dispositif scénique est simple, fait de sombres panneaux mobiles, de piquets et de deux tables, il permet de recomposer régulièrement l’espace de jeu, et fonctionne plutôt bien. On sera un peu plus sceptique quant à la fin un peu téléphonée. On y rencontre la Jocelyn Bell, désormais âgée, interviewée par un journaliste. Nulle rancœur de la part de l’astrophysicienne à laquelle la science a depuis largement rendu hommage. C’est un beau portrait de femme, clair et optimiste qui nous est proposé, le portrait d’une femme qui a suivi sa route tout en n’ayant pas le premier rôle. Mais laissons-la conclure : « Je ne crois pas que j’aurais découvert les pulsars si je n’avais pas fait partie des outsiders »

Eric Dotter



 
 
 
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